Les Randos de Fred & Paul

GR 65 : La Romieu → Condom (13 km) - juin 2017

Le petit déjeuner étant servi à partir de 8 h, nous en profitons pour faire la « grasse matinée ». Nous devons nous rendre dans la maison des propriétaires pour prendre le premier repas de la journée. Par erreur, nous pénétrons dans l’habitation par la mauvaise porte et voilà la dame qui s’énerve et nous jette dehors... Nous revenons quasiment au même endroit, mais en passant par la bonne entrée cette fois. Autant le monsieur, hier, était sympathique, autant son épouse, que nous rencontrons pour la première fois, semble antipathique.

Si le petit déjeuner proposé est relativement correct, la dame, on ne sait trop pourquoi, nous parlera, durant tout le repas, des divers pèlerins et randonneurs qui sont déjà passés par ici. Par politesse, nous écoutons ses récits, peu intéressants, et sommes surpris des propos racistes et xénophobes employés. Nous ne prolongeons pas plus longtemps que nécessaire et quittons rapidement cette chambre d’hôtes.

C’est à La Romieu que le GR 65 est rejoint par le GR 652 ; ce sentier de grande randonnée permet de se rendre, en 240 km, jusqu'à la charmante cité de Rocamadour. Il est 8 h 45 lorsque nous commençons cette courte étape. Étant donné qu’il fait, comme depuis plusieurs jours déjà, très chaud, cela ne nous dérange pas de pouvoir finir tôt cette randonnée. Nous quittons la « cité des chats » en suivant, sur 800 mètres, la D41. Heureusement, ici, comme en de nombreux endroits dans le département du Gers, un sentier parallèle à la grand-route a été aménagé.

GR 65 entre La Romieu et Castelnau-sur-l'Auvignon

Nous empruntons, sur la droite, un sentier ombragé avant de retrouver le goudron, à proximité du château de Madirac. Une inscription gravée sur la tourelle d'angle donne la date de construction de ce château. Cette demeure, de style Renaissance gasconne, a été bâtie, en 1582, pour Bertrand du Bousquet, président au tribunal de Condom.

Le tracé blanc et rouge contourne le château et se poursuit sur un chemin herbeux. Après 500 mètres, nous atteignons une petite route suivie, en montée, jusqu’à la D41. De l’autre côté de la grand-route, nous descendons (de 163 à 116 mètres d’altitude) sur un chemin herbeux vers le ruisseau de Mourelot. Étant dans le fond du vallon, il nous faut à présent grimper vers Castelnau-sur-l’Auvignon (164 mètres d’altitude).

GR 65 entre La Romieu et Castelnau-sur-l'Auvignon

Ayant déjà parcouru 5 km, nous nous octroyons une petite pause à l’entrée du village. Jusqu’à la Révolution, Castelnau-sur-l’Auvignon s’appelait Castelnau-des-Loubères ; cette appellation évoque l’idée d’un repaire de loups. Il est possible que les pentes escarpées, voisines de la rive droite de l’Auvignon, aient jadis été couvertes de bois abritant ces animaux.

Ce site d’éperon, choisi dès le Xe siècle pour son caractère naturellement défensif, et cette construction en forme de navette sont les caractéristiques des petites places fortifiées de la région appelées castelnaux. Le village abritait, en son cœur, un château du XIIIe siècle accosté d'une tour carrée qui servait de donjon. Un second château s'ajoute au XIVe siècle composé d'une tour ronde, toujours visible.

Dès 1942, le village a abrité un important réseau de résistants dont l'originalité repose sur la participation au combat de diverses nationalités. En effet, Français, Espagnols, Britanniques et Italiens se sont réunis pour lutter ensemble contre le fascisme. Le 21 juin 1944, Castelnau est le théâtre d'un violent combat entre les résistants et les troupes allemandes qui encerclent le village. La tour carrée est bourrée d'armes, d'explosifs et munitions auxquels le feu est mis soufflant ainsi le village qui sera entièrement détruit.

La complicité de toute la population avec les résistants vaut au village d'être cité et décoré, en novembre 1948, de la Croix de guerre avec étoile de vermeil. Un monument en forme de péristyle a été élevé, à l'ouest du village, en hommage aux combattants morts pour la liberté.

GR 65 : Castelnau-sur-l'Auvignon

Nous quittons Castelnau-sur-l’Auvignon en descendant, par un chemin de terre, vers l’Auvignon. Cette rivière, de 56 km, prend sa source au Mas d’Auvignon (Gers) et se jette dans la Garonne à Feugarolles (Lot-et-Garonne). C’est à la sortie du village que nous retrouvons l’itinéraire de liaison qui, partant de la chapelle d’Abrin (étape précédente), permet de rejoindre Condom en évitant le passage par La Romieu.

GR 65 entre Castelnau-sur-l'Auvignon et Condom

Nous traversons le cours d’eau et montons, une fois de plus, sur la colline en face. C’est par un chemin herbeux, au milieu des champs, que nous arrivons au hameau de Pavail. Au sommet, nous progressons sur le goudron durant un kilomètre. En cours de route, nous visitons la chapelle Sainte-Germaine.

Passé le portail, nous découvrons, au bout de l'allée, une grande ouverture en plein-cintre, datée de 1730, nous invitant à pénétrer dans une cour pavée ceinte de hauts murs : le caquetoire. Un porche, à demi couvert, protège la porte de l'église romane des intempéries. Hermana, la fille du seigneur des lieux, fonda ici un monastère très vite florissant et prospère. Quand les Normands (ou les Sarrazins) « visitèrent » l'établissement sans ménagement, Hermana et ses sœurs, martyrisées, y perdirent la vie. Le monastère a été reconstruit au début du XIIe siècle et le nom de Santa Hermana lui fut donné, transformé ensuite en Sainte-Germaine. Du monastère disparu, il ne reste que l'église et sa tourelle contenant l'escalier à vis qui monte au clocher.

GR 65 : Baradieu, chapelle Sainte-Germaine GR 65 : Baradieu, chapelle Sainte-Germaine

Nous empruntons ensuite un chemin empierré passant à côté d’une imposante demeure avant de rejoindre le lac de Bousquètara. Celui-ci est en fait un lac de retenue situé sur le Garaillon, petite rivière de 10 km, affluent de l’Auvignon. C’est par un chemin herbeux que nous longeons, durant un kilomètre, ce lac dont le niveau semble fort bas. Un panneau nous informe que nous entrons ici en Armagnac Ténarèze, une des trois régions de production de la célèbre eau-de-vie.

GR 65 entre Castelnau-sur-l'Auvignon et Condom GR 65 entre Castelnau-sur-l'Auvignon et Condom

Au bout du lac, nous retrouvons l’asphalte sur lequel nous progressons, en quasi ligne droite, au milieu des champs et des vignes. Après deux kilomètres, le tracé blanc et rouge atteint un chemin empierré qu’il suit, en descente, toujours à travers la belle campagne gersoise. Au loin, nous apercevons Condom ; ville que nous atteignons vers 12 h 15.

GR 65 entre Castelnau-sur-l'Auvignon et Condom

Le gîte n’ouvrant qu’à 14 h 30, nous décidons, après avoir mangé, de visiter une partie de la cité. « Condatomagos » évoque un marché « magos » établi au confluent « condate » de la Gèle et de la Baïse (bien prononcer le tréma). En 1011, Condom entre dans l’histoire lorsqu’une abbaye, dédiée à Saint-Pierre, est élevée et confiée aux bénédictins. Celle-ci s’enrichit notamment grâce au passage des pèlerins se rendant à Compostelle.

Par la suite, Condom devint une ville plus importante et le siège d'un évêché (au XIVe siècle). L'abbaye originale fut alors détruite pour laisser la place à la nouvelle cathédrale Saint-Pierre. Mais cette dernière se dégrada rapidement, au point qu'un nouvel édifice, de style gothique, fut bâti, de 1507 à 1531, durant l’épiscopat de Jean Marre.

GR 65 : Condom, cathédrale Saint-Pierre

L’ensemble architectural est composé d’une large nef unique, flanquée de chapelles latérales. Le bâtiment est couronné par une large verrière donnant une grande clarté à la nef. Le chœur, du XIXe siècle, est inspiré de la cathédrale Sainte-Cécile d’Albi et a remplacé l’ancien chœur détruit à la Révolution ; il est orné de grandes statues d’anges et de saints. En arrière du chœur, s’ouvre une chapelle, dédiée à la Vierge, datant du XIVe siècle ; elle a été conservée et intégrée lors de la construction de la cathédrale.

GR 65 : Condom, cathédrale Saint-Pierre

Le portail sud se compose d’une porte, du XVIe siècle, encadrée par trois voussures sculptées de 24 personnages. Le regard de ces anges et personnages de l’Ancien Testament converge vers une statue aujourd’hui disparue.

GR 65 : Condom, cathédrale Saint-Pierre

Tout comme la cathédrale, le cloitre subit de nombreuses destructions lors des guerres de Religion. Suite à la Révolution, il fut vendu en tant que bien national et utilisé à des fins commerciales. Aujourd’hui, le cloitre fait office de passage. On peut encore y admirer neuf clés de voûte polychromées présentant les armoiries des abbés, évêques et seigneurs de Condom. L'installation électrique, disséminée un peu partout, est assez disgracieuse.

GR 65 : Condom, cloitre de la cathédrale

Un ensemble de quatre statues, inauguré en 2010, s'élève au pied de la cathédrale. Les mousquetaires Porthos, d'Artagnan, Aramis et Athos (de droite à gauche), de leur 2,30 mètres de hauteur chacun, croisent leur fer de bronze et s'imposent par leurs 5,5 tonnes.

GR 65 : Condom, les 4 mousquetaires

Après ce petit tour de ville, nous arrivons au gîte « Le Champ d’Étoiles » où nous sommes chaleureusement accueillis par Anne-Charlotte. Nous retrouvons nos amis canadiens, Marielle et Roger, avec qui nous souhaitons visiter le musée de l’armagnac. Malheureusement, alors que le musée ferme ses portes à 17 h, 45 minutes avant nous ne pouvons déjà plus entrer...

L'armagnac est la plus ancienne eau-de-vie de France. Connu au Moyen Âge pour ses vertus thérapeutiques, il prend tout son essor au XVIIe siècle pour devenir un véritable produit de consommation. Vers 1830, les maisons de commerce s'installent sur la Baïse, affluent navigable de la Garonne. Détruit par le phylloxera (ravageur de la vigne) dans les années 1870, le vignoble renaît au début du XXe siècle.

Situé au cœur de la Gascogne, le vignoble s’étend sur trois départements : le Gers, les Landes et le Lot-et-Garonne. Trois régions de production qui donnent des eaux-de-vie marquées par un terroir différent : le Bas-Armagnac (Eauze), La Ténarèze (Condom) et le Haut-Armagnac (Auch).

GR 65 : les trois régions de production de l'Armagnac

L'eau-de-vie est produite à partir de vins blancs issus de raisins blancs, ayant une bonne acidité et un faible degré d'alcool. Ce vin a ainsi une bonne capacité à conserver toute sa fraîcheur et ses arômes jusqu’à la distillation. Les raisins, récoltés fin septembre, sont pressés et le jus est mis en fermentation de la façon la plus traditionnelle et naturelle qui soit, sans aucun ajout.

La distillation s'effectue pendant l'hiver dès les fermentations terminées, avant le 31 mars de l'année qui suit la récolte. De l'alambic sort une eau-de-vie, incolore et très aromatisée, de 52° à 60°. L’eau-de-vie est ensuite travaillée et son degré d'alcool abaissé afin de mettre en valeur son fruité et sa rondeur en bouche. Pour devenir un alcool brun, l’armagnac a besoin de l'apport du bois et de nombreuses années de vieillissement.

GR 65 : dégustation d'Armagnac

Après une douche froide (par manque de fuel dans la citerne), nous nous reposons un peu dans le jardin avant de déguster le bon repas préparé par Anne-Charlotte. L’accueil et la sympathie de cette jeune hébergeuse contrastent nettement par rapport à nos deux nuitées précédentes. La température étant encore très chaude dans la soirée, nous avons un peu de mal à trouver le sommeil.