Camino : Roncevaux → Zubiri (22 km) - juin 2019
Après un bon petit-déjeuner, nous quittons Roncevaux vers 9 h. Si le vent s’est considérablement calmé par rapport à hier, il fait frais ce matin (7°) et nous supporterons la veste toute la matinée. Les deux premiers kilomètres, jusqu’à Burguete, s’effectuent sur un sentier, parallèle à la N135.
Ce parcours passe dans le bois de « Sorginaritzaga » (chênaie des sorcières) ; c'est ici qu'auraient eu lieu, au XVIe siècle, de célèbres sabbats qui déclenchèrent les persécutions et la mort sur le bûcher de neuf personnes. Afin de purifier l'endroit, une croix blanche, symbole de protection divine utilisé par l'Église, y fut dressée.
À la sortie de Roncevaux, nous avons découvert la « croix des pèlerins », un calvaire gothique en pierre, du XIVe siècle, où figurent une image de la Vierge et les effigies du roi Sanche VII le Fort et de son épouse Clémence.
En suivant la N135, nous entrons dans Burguete, un charmant village basque avec ses maisons aux façades blasonnées des XVIIIe et XIXe siècles. C’est ici que lors de ses séjours en Navarre, entre 1923 et 1959, l’écrivain Ernest Hemingway aimait passer quelques jours et aller pêcher la truite dans la rivière Irati.
À la sortie de Burguete, nous prenons, sur la droite, un chemin cimenté descendant vers une rivière que nous franchissons grâce à une passerelle en bois. Après des entrepôts agricoles, le parcours continue sur un chemin gravillonné passant entre des prairies.
Alors que le chemin devient de plus en plus étroit, nous traversons deux petits ruisseaux sur de rudimentaires ponts de pierre.
Une petite route, à la sortie d’un bois, nous amène, en un kilomètre, à Espinal. C’est, ici aussi, en suivant la N135 que le Camino Francés traverse ce village basque. L’église moderne (1961), dédiée à San Bartolomé, dénature un peu le charme du village.
Tout comme Burguete, Espinal a été fondé par le roi Teobaldo II en 1269, « afin que les pieux roumieux aient, entre les deux villages de Roncevaux et de Bizkarreta, un autre lieu où se recueillir et qui soit comme une sentinelle contre les attaques qui se perpétuent souvent dans ces lieux déserts ».
Ayant déjà parcouru 6,5 km, nous effectuons une petite pause avant d’entamer la première ascension du jour en direction du col de Mezkiritz. La montée commence sur une piste goudronnée à travers champs et se poursuit, 600 mètres plus loin, sur un sentier en lisière de prairies.
Au col de Mezkiritz (922 mètres d’altitude), située sur la N135, nous apercevons une stèle représentant la Vierge de Roncevaux. De l’autre côté, les flèches jaunes nous indiquent la direction à suivre ; même si nous verrons encore de temps en temps des balises GR, ce sont essentiellement ces flèches jaunes qui vont désormais nous guider.
Nous passons un portillon et traversons une belle hêtraie. Nous descendons ensuite un chemin pavé, parallèle à la grand-route.
Le parcours franchit, grâce à un étonnant système, un ruisseau et remonte, toujours à côté de la N135, vers Bizkarreta.
Comme la majorité des randonneurs, nous effectuons la pause de midi dans un sympathique établissement, à l’entrée du village. Bizkarreta a probablement été fondée au XIIe siècle, date à laquelle on sait qu'il existait un hôpital pour pèlerins (dont il ne reste que peu de vestiges) qui était un arrêt obligatoire avant la construction de l'hôpital de Roncevaux.
Bizkarreta, dont le nom signifie : région de collines, possède quelques belles maisons blasonnées. C’est notamment dans ce village que l’on produit le patxaran, une liqueur fabriquée à partir de la macération de prunelles sauvages dans de l'alcool anisé.
Les deux kilomètres nous séparant de Lintzoain se font d’abord sur un beau sentier en sous-bois puis, de l’autre côté de la N135, sur un chemin caillouteux. Nous traversons le village et abordons la seconde côte de l’étape (de 734 à 843 mètres d’altitude).
Pendant 2 km, l’itinéraire continue en faux plat avant de lentement descendre vers le « Puerto de Erro ». Si ce tronçon forestier est vraiment très agréable, de temps à autre, des panneaux ou croix nous rappellent que certains meurent en chemin ; ils viennent parfois de loin comme ce Japonais décédé en 2002.
Nous traversons la N135 et effectuons une pause boisson, près d’une grande antenne, avant d’amorcer la descente finale vers Zubiri. En 3,5 km, nous passons de 800 à 530 mètres d’altitude ; un parcours très accidenté et rocailleux qui, on l’imagine, doit être fort glissant lorsqu’il pleut.
Vers 15 h, nous quittons le tracé du Camino Francés. Afin de rejoindre le centre de Zubiri, nous traversons l’Arga. Cette rivière avec ses 145 km est la plus longue de Navarre ; elle arrose, entre autres, Pampelune et Puente la Reina. Nous retrouverons et suivrons régulièrement cette rivière lors des deux prochaines étapes.
Un document datant de 1097 mentionne l’existence du pont ; cette année-là, le roi Pedro Ier d’Aragon et de Navarre fait don à l’église de Pampelune « d’un village appelé Zubiría », ce qui signifie : à côté du pont. Bien que l’ouvrage d'origine puisse être du XIe siècle, voire même de l'époque romaine, la construction actuelle date du XIVe siècle.
Construit en pierre de taille, le pont à deux arches mesure environ 30 mètres pour une largeur de 3,60 m. Ce pont est appelé « puente de la Rabia » (pont de la Rage) car, d’après la légende, un animal qui passait trois fois en dessous, guérissait de la rage.
Après un peu de repos et avant le repas de 19 h 30, nous effectuons un rapide tour de ce village qui conserve quelques demeures du XVIIIe siècle. Zubiri est le chef-lieu de la commune d'Esteribar, composée de 31 villages ou hameaux.