Les Randos de Fred & Paul

Camino : Hornillos del Camino → Castrojeriz (21 km) - avril 2023

Pour info : le parcours décrit ci-dessous emprunte certaines variantes non balisées.

Vers 9 h, c’est sous un ciel bien bleu, mais avec, comme hier, une température négative que nous commençons cette étape. Au centre d’Hornillos del Camino, près de l’église dédiée à San Román, nous découvrons une fontaine en pierre avec un coq sculpté à son sommet.

Selon la légende, lorsque les troupes napoléoniennes ont été vaincues pendant la guerre d'indépendance, un groupe, fuyant en retraite, s’est arrêté à Hornillos. Ils avaient faim et profitant du fait que les habitants étaient dans l'église, ils ont fait le tour des fermes, prenant tous les coqs et les poules.

Pour passer inaperçus, ils les ont tués et cachés dans les tambours, se rassemblant ensuite sur la place de la fontaine. Quand, après la messe, les villageois constatèrent la disparition des animaux, ils se rendirent à la fontaine pour demander des explications aux Français, qui nièrent être au courant de ce qui s'était passé.

C'est alors qu'une femme, devant tant de malheur, demanda avec ferveur l'intercession divine et que le miracle se produisit. Sous les regards incrédules des personnes présentes, l'un des coqs morts se mit à chanter de l'intérieur d'un tambour, découvrant ainsi le méfait. Dès lors, le coq devint le symbole du village et la fontaine fut rebaptisée fontaine du coq.

Hornillos del Camino, fuente

Dès la sortie d'Hornillos, nous empruntons un chemin caillouteux qui monte (de 830 à 935 m d’altitude), pendant deux kilomètres, au milieu des terres cultivées. Arrivés sur le plateau, marquant le début de la Meseta, nous poursuivons dans la même direction, durant un kilomètre. Peu après une croix templière, plantée sur un tas de cailloux, nous descendons légèrement afin de franchir l’arroyo de San Bol.

Ce ruisseau s’écoule devant un ancien ermitage, aujourd'hui converti en auberge pour les pèlerins. En 1352, la présence d'une léproserie, puis d'un monastère de l'ordre de Saint-Antoine est attestée. Le village de San Bol (ou San Baudilio) s’est développé autour de ce monastère, mais pour des raisons mal connues, vers 1503, il a été abandonné par ses habitants.

Camino Francés entre Hornillos del Camino et Hontanas Camino Francés entre Hornillos del Camino et Hontanas

Le Camino Francés remonte vers le plateau agricole et progresse sur celui-ci pendant environ quatre kilomètres. Soudain, dans le creux d’un vallon, nous apercevons Hontanas vers lequel nous descendons. Le village doit son nom aux nombreuses fontaines (« fontanas ») qu’il possède.

Camino Francés entre Hornillos del Camino et Hontanas Hontanas

L'église, dédiée à l'Immaculée Conception, avec sa coupole en forme de demi-orange, a été érigée au XIVe siècle ; au fil du temps, elle a subi de nombreuses transformations la faisant évoluer du gothique au néoclassique. Une tour de défense, construite aux XIIe et XIIIe siècles, est adossée à l'église ; on y accède depuis l'intérieur de l'édifice religieux.

Hontanas, église Inmaculada

L'église a été construite à côté du palais du prélat de Burgos, auquel elle appartenait depuis 1208, lorsque le roi Alphonse VIII obligea l'évêque de Burgos à acheter le village avec son église pour cinq cents maravédis (pièces d'or) qu'il préleva sur les biens de la cathédrale ; un arc gothique subsiste encore aujourd'hui de ce palais.

Hontanas, palais de l'évêque

Nous nous éloignons d'Hontanas en franchissant une route (que nous retrouverons plus tard) ainsi que l’arroyo del Garbanzuelo ; la suite du parcours se déroulera à proximité de ce petit cours d’eau. Contrairement à une rivière, un arroyo dépend des averses ou de la saison des pluies pour exister ; il est donc fréquent qu’il disparaisse durant la saison sèche.

Camino Francés entre Hontanas et Castrojeriz

Après la pause repas, à l’ombre de quelques pins, nous marchons, pendant 2,5 km, sur un petit chemin évoluant à flanc de colline… le plus beau tronçon de cette étape. Nous passons à côté des vestiges (2 m de long et environ 8 m de haut) d’un contrefort de l'église de Valdemoro.

Ce village, avec son église, dédiée à San Vicente, et probablement un monastère du même nom, est mentionné en 1173, mais pas dans les recensements paroissiaux de 1591-1594, ce qui permet de supposer qu'il avait déjà été déserté.

Camino Francés entre Hontanas et Castrojeriz

La fin de cette randonnée s’effectue, normalement, sur la route, précédemment évoquée ; il n’en sera pas de même pour nous. Jusqu’au monastère de San Antón, nous empruntons un chemin, en cours d’aménagement, sur le côté droit de la route.

Camino Francés entre Hontanas et Castrojeriz

À la périphérie de Castrojeriz, sur ce qui était autrefois le palais et le verger du roi Pedro Ier de Castille, se trouvent les ruines de ce monastère. Il était gouverné par les Antoniens (Ordre des Frères Hospitaliers de Saint-Antoine) qui se consacraient à soigner les malades qui arrivaient sur le Chemin de Saint-Jacques, en particulier ceux qui souffraient de la maladie connue sous le nom de feu de San Antón, le feu sacré, le feu des malades.

Fondé par le roi Alphonse VII, en 1146, ce monastère était très important, car il était le siège de l'Encomienda General de l'Orden de San Antonio dans les différents royaumes de la Couronne de Castille et du Portugal, avec plus de vingt encomiendas dépendantes (maisons - monastères - hôpitaux). À la fin du XVIIIe siècle, Charles III ordonna la dissolution de l'ordre.

En 1835, avec la Desamortización de Mendizábal, certaines parties des bâtiments sont passées entre les mains de propriétaires privés tandis que le reste tomba en ruines. Ce n'est qu'en 2002 que ce monastère emblématique a repris vie, remplissant la même fonction que celle pour laquelle il avait été construit. Le monastère de San Antón se composait d'une église située sur le côté sud de la route et d'une auberge avec son cimetière respectif sur le côté nord.

Les pèlerins devaient obligatoirement passer par le portique de l'église. Celle-ci consistait en un grand bâtiment avec un plan en croix latine et une seule nef à deux travées, se terminant par une grande abside polygonale et un transept avec deux chapelles polygonales. L'entrée de l'église se faisait par une porte à six archivoltes décorées de statues ; cette entrée était protégée par un arc surélevé du XVIe siècle.

L'ensemble de la structure a aujourd'hui perdu ses voûtes, mais les nervures qui permettaient de soutenir les voûtes d'arêtes sont encore visibles. Certaines pierres de taille de l'édifice portent une marque avec la lettre tau, symbole de l'ordre. La partie la mieux conservée est la magnifique abside centrale avec deux étages de fenêtres en ogive entre de puissants contreforts extérieurs.

Monastère de San Antón Monastère de San Antón

À la sortie de l’ancien site monastique, nous progressons, pendant 500 mètres, au bord de la route avant d’opter pour une variante (non-officielle) plutôt que de rester sur l’asphalte. Ce parcours, 700 m plus long, prend d’abord la direction du village de Villaquirán de la Puebla, puis continue sur un chemin de terre, entre les champs, jusqu’au couvent de Santa Clara ; nous profitons d'un vaste point de vue sur Castrojeriz.

Camino Francés entre Hontanas et Castrojeriz Castrojeriz

De retour sur le Camino Francés, à l’entrée de Castrojeriz, nous découvrons la collégiale de Nuestra Señora del Manzano (Notre-Dame du Pommier). La construction de l’édifice religieux a commencé en 1214, selon la volonté de Doña Berenguela, fille d'Alphonse VIII de Castille et mère de Ferdinand III de Castille.

Au XVe siècle, la collégiale a subi une profonde réforme qui a touché toutes ses voûtes, mais la modification la plus profonde a été réalisée au XVIIIe siècle lorsque, conformément aux canons du style néoclassique, la tour a été achevée, le chœur a été transformé pour lui donner un usage funéraire et la chapelle de la Virgen del Manzano a été construite.

À côté du baptistère, on trouve un sépulcre gothique dans lequel repose la reine Eléonore de Castille, fille de Ferdinand IV et épouse du roi Alphonse IV d'Aragon, assassinée en 1359, au château de Castrojeriz, sur ordre de son neveu, Pedro Ier de Castille.

Dès sa découverte, en juin 1970, la tombe a été attribuée par les experts à la reine Eléonore, car on sait que celle-ci avait été enterrée dans un tombeau placé à gauche du maître-autel, et que ce sépulcre avait été déplacé à son emplacement actuel lors de la construction de la crypte pour l'enterrement des comtes de Castro, un travail réalisé au XVIIIe siècle.

Castrojeriz, collégiale Nuestra Señora del Manzano

Avant de nous rendre à l’hôtel, nous décidons de grimper jusqu’au sommet de la colline, à 917 mètres d'altitude, pour admirer le château dont il ne reste que des ruines, et le panorama sur les alentours.

La construction a commencé à la fin du IXe siècle, à partir d'une ancienne tour romaine (IIe siècle). Le château a été agrandi aux XIVe et XVe siècles ; sa forme est très irrégulière, en raison des agrandissements successifs qu'il a subis et de son adaptation à l'escarpement du terrain.

Autrefois, une barbacane, dont il ne reste presque rien, parallèle au château, se terminait au nord par une tour encore bien conservée. La place d'armes, la partie la plus irrégulière du château, se trouve à un niveau un peu plus bas que le reste de la forteresse, car les murs sont construits directement dans la roche.

Le corps le plus important de la forteresse se compose de trois parties. La partie sud est très endommagée. La partie centrale, probablement le donjon, communique avec la place d'armes par une petite porte en ogive, à côté de laquelle se trouve un étroit escalier en fuseau éclairé par de nombreuses meurtrières.

La partie occidentale était constituée d'un donjon auquel on accédait depuis le corps précédent. Le mur qui entoure ces trois parties a une épaisseur de près de trois mètres afin de réduire sa faiblesse. Un grand fossé est encore visible aujourd'hui, isolant le château du plateau.

Castrojeriz, ruines du château Castrojeriz, ruines du château Castrojeriz, ruines du château

En fin d’après-midi, nous découvrons (1 € par personne sur présentation de la credencial) l’église Santo Domingo. Celle-ci abrite un intéressant musée « Iacobeus » consacré au Chemin de Compostelle et à ses légendes. Grâce à la petite visite guidée, en français, nous apprenons notamment que, suite au tremblement de terre de Lisbonne de 1755, certains murs ne sont plus très droits…

Sur un des murs (côté rue), on peut voir deux têtes de mort représentant le passé « O Mors » et l’éternité « O Eternitas ».

Castrojeriz, église Santo Domingo

Nous visitons également l’église San Juan (1 € par personne), de style gothique, construite au XIIIe siècle. La tour, vue de l'extérieur, montre la transition entre le roman et le gothique, car les fenêtres de la première section ont des arcs en plein cintre et celles de la seconde des arcs en ogive, tandis que les angles sont terminés par des pinacles.

Au XVIe siècle, une nouvelle église plus spacieuse a été construite dans le style gothique allemand - également appelé style halle : les nefs latérales sont à la même hauteur que la nef centrale et les nervures des voûtes partent du pied des colonnes, sans chapiteaux.

De la première église, il ne reste que l'abside et le cloître, avec son plafond à caissons de la fin du XVe siècle. Le cloître présente trois galeries avec des colonnes doubles soutenant des arcs en ogive ; la quatrième (au nord) a été démolie lors de l'agrandissement de l'église, au XVIe siècle.

Castrojeriz, église San Juan Castrojeriz, église San Juan

Vers 19 h, nous nous rendons au restaurant « El Mesón » pour le repas. Nous y retrouvons Dany et Michel, deux pèlerines de Lyon et un randonneur de Paris.

Plan du parcours