GR 14 : Malempré → La Roche-en-Ardenne (25 km) - mars 2018
Groupé à flanc de colline autour de l'église Saint-Martin, Malempré est un village typique qui compte de nombreuses fermes en long de la première moitié du XIXe siècle, en moellons de schiste et de grès. Souvent endommagées lors de la Seconde Guerre mondiale, elles ont été fortement restaurées ou transformées. Cependant, les toitures en cherbains (plaques de schiste plus ou moins épaisses et courbes dans le bas) ont souvent été maintenues.
En face de l’église, nous empruntons le sentier du Bi del Chuma et quittons la localité par la rue des Spinettes. Après 850 mètres, le tracé blanc et rouge tourne à gauche et poursuit l’ascension sur un chemin empierré. Nous suivons ce dernier, au milieu de la forêt, jusqu’à la N30 (Liège - Bastogne).
Nous marchons le long de cette grand-route, sur 350 mètres, et tournons à gauche sur une petite route reliant Malempré à Odeigne ; durant 800 mètres, nous progressons sur cette dernière. Dans un virage, près d’une aire de pique-nique, nous quittons l’asphalte pour monter un chemin de terre, parallèle au ruisseau du Fayi de la Folie.
Peu avant l’entrée dans la « Réserve naturelle du plateau des Tailles », nous prenons, sur la droite, un chemin envahi par l’eau et les arbres déracinés. Situé aux confins des provinces de Luxembourg et de Liège, le plateau des Tailles, qui culmine à 652 mètres à la Baraque de Fraiture, est traversé de part en part par l'autoroute E25.
Il est en grande partie couvert de forêts, dans lesquelles l'épicéa domine largement, suivi par le hêtre. Ces zones boisées sont entrecoupées par des milieux ouverts, pour la plupart largement modifiés par l'homme : prairies pâturées, prairies de fauche, landes sèches et humides. Les tourbières n'occupent que des surfaces très marginales.
Une multitude de ruisseaux naissent sur le plateau ; ils appartiennent quasi à parts égales aux bassins hydrographiques de l'Ourthe et de l'Amblève. Cette réserve naturelle a été créée en 1967, soit 10 ans après celle des Hautes Fagnes, et sa surface s’est progressivement agrandie pour atteindre 682 hectares, répartit sur différents sites.
Nous franchissons le ruisseau du Fayi de la Folie sur une dalle d’ardoise et poursuivons, entre les prairies, jusqu’à Odeigne. Selon une interprétation, les premiers habitants du pays, très idolâtres, avaient le dieu Odin pour principale divinité. Une espèce de statue de ce dieu se trouvait sur le territoire où fut bâti le village ; de là lui serait venu son nom.
Lorsque le christianisme s'implanta dans le pays, Odeigne devint propriété de l'abbaye de Stavelot (jusqu'à la Révolution) et fit partie du ban de Lierneux. Sous le gouvernement de l'abbaye, la localité et ses habitants ont vécu dans une grande aisance.
L'église Saint-Donat, de style néoclassique, et a été construite en moellons de grès en 1846. L'existence d'un sanctuaire à Odeigne remonterait cependant au IXe siècle. La façade est dominée par la tour dont le clocheton terminal ajoute une note particulière à sa silhouette assez traditionnelle. À l'extérieur, on peut voir de nombreux monuments funéraires, notamment des croix en pierre d'Ottré des XVIIIe et XIXe siècles.
Après une petite pause, nous nous remettons en route vers le prochain village : Dochamps, situé à neuf kilomètres. À la sortie d’Odeigne, nous montons une petite route (de 501 à 527 mètres d’altitude) et profitons, en nous retournant, d’une belle vue sur le village.
Nous entrons ensuite dans la forêt et descendons jusqu’à l’Aisne. Cette rivière prend sa source, à une altitude de 630 m, dans la fagne du Pouhon sur le plateau des Tailles. Après un parcours d’une trentaine de kilomètres, le cours d'eau rejoint l’Ourthe à Bomal, à 140 m d'altitude.
Une centaine de mètres après avoir franchi la rivière, le tracé blanc et rouge continue sur un chemin empierré qui, évidemment, prend de la hauteur. Plus loin, nous avançons sur un chemin herbeux, de moins en moins visible, au milieu des bruyères et genêts. Au terme de ce tronçon, nous débouchons sur un chemin empierré, à proximité d’un pont surplombant l’Aisne.
Pendant 1,5 km, nous suivons, en quasi ligne droite, ce chemin montant jusqu’à la route reliant la N89 au village de Lamormenil. Nous sommes, à cet endroit, au point culminant de l’étape à 608 mètres d’altitude ; c’est également le point le plus élevé de tout le GR 14. Il n’est donc pas étonnant de découvrir un panneau annonçant que le chemin que nous venons de suivre est aussi une piste de ski.
De l’autre côté de la route, nous suivons un chemin de terre, légèrement caillouteux, descendant lentement au milieu de la forêt, où dominent les conifères. Après trois kilomètres, nous franchissons le ruisseau de l’Alu (471 mètres d’altitude) et quittons, un peu plus loin, le couvert forestier. Nous retrouvons l’asphalte et longeons un vaste camping avant d’atteindre la N841, à l’entrée de Dochamps.
La seigneurie de Dochamps remonte aux premiers temps de la féodalité. Elle a appartenu aux comtes d'Ardenne et de Montaigu, aux seigneurs de Rochefort et de la Marck, familles turbulentes qui ont marqué l'histoire jusqu'à la fin de la féodalité. Le 16 août 1642, une troupe de réformés hollandais ravagea le village qui fut mis à sac et livré ensuite aux flammes.
Plusieurs habitants périrent dans la tour de l'église où ils avaient trouvé refuge. D'autres, heureusement, s'étaient réfugiés avec enfants et bétail au plus profond du Bois Saint-Jean et reconstruisirent le village. Dochamps a également souffert de la Seconde Guerre mondiale et tout particulièrement lors de l'offensive des Ardennes.
L'église Saints-Pierre-et-Paul date de la seconde moitié du XVIIe siècle, mais a été construite sur base d'une église plus ancienne (XIe siècle) brûlée en 1642 et dont subsiste la tour, de style roman. Elle fut alors reconstruite en grande partie grâce aux démarches des frères Germai qui collectèrent jusqu'auprès du roi Louis XIII.
L'histoire raconte qu'à la question du roi de savoir combien de louis seraient nécessaires pour rebâtir l'église, ceux-ci répondirent fort à propos : « Sire, un seul suffit... ». Le roi, saisissant l'allusion, donna ordre de leur remettre une somme suffisante pour achever l'édifice.
Les bienfaits de ces deux révérends pères, du village de Lamormenil, sont immortalisés par une inscription gravée sur une pierre placée au milieu du parvis de l'église. L'église a encore été restaurée suite aux dégâts causés par l'offensive de 1944.
Dans le centre de Dochamps, nous trouvons une taverne « Le Miroir » qui nous accepte pour la pause pique-nique ; nous mangeons nos tartines avec un verre de Chouffe. Après le repas, c’est sous un ciel bien gris que nous quittons le village en grimpant un chemin herbeux dénommé « Pazai de Bénasse ». Près de ce qui ressemble à un hôtel à l’abandon, nous retrouvons l’asphalte, et continuons la montée sur celui-ci, durant 600 mètres.
Peu après un ancien terrain de football, le GR 14, en pénétrant dans les bois, atteint 577 mètres d’altitude. Nous entamons ensuite la longue et lente descente vers le village de Cielle. Pendant environ cinq kilomètres, nous progressons au milieu des bois.
Le début de ce tronçon s’effectue sur des chemins devenus très boueux suite à des travaux de débardage. Au niveau d’un carrefour de voies forestières, au lieu-dit « Queue de Veau », nous prenons un chemin empierré passant dans une zone récemment déboisée. 600 mètres plus loin, nous revenons en pleine forêt et longeons une carrière de grès.
Le tracé blanc et rouge, ayant retrouvé les prairies et l’asphalte, atteint ensuite Cielle (350 mètres d’altitude). Nous effectuons une brève pause près de la chapelle Delacolette (XIXe siècle) dédiée à Notre-Dame et à Saint-Lambert. Nous passons près de l’église et suivons la route du Tram descendant vers l’Ourthe.
Un kilomètre plus loin, dans un virage, nous quittons l’asphalte pour emprunter un sentier permettant d’éviter une large boucle de la route. C’est sous la pluie que nous cheminons dans la vallée (235 mètres d’altitude) en direction du pont du Tram, traversant l’Ourthe. Le tram a permis de désenclaver l'Ardenne et de lier de nombreuses localités au grand réseau ferré.
La ville de La Roche-en-Ardenne se trouvait sur le terminus d'une ligne longeant l'Ourthe jusqu'à la gare de Melreux en passant par Rendeux et Hotton. Cette ligne, en tout temps fort fréquentée, notamment par les touristes qu’attirait la cité de La Roche-en-Ardenne, fut inaugurée en grande pompe le 9 octobre 1887. À la fin des années 1950, le tram a été remplacé par des lignes de bus.
Si de l’autre côté de l’Ourthe, il ne nous reste plus qu’un kilomètre pour rejoindre le centre de La Roche-en-Ardenne, le début de ce tronçon sera le plus éprouvant de l’étape. Après avoir longé un camping, nous grimpons un sentier dans le versant boisé (12 % de dénivelé). Vers la crête, le chemin s’élargit et descend, sur l’autre versant, jusqu’à la N820 à l’entrée de la cité.
➔ Jonction avec d'autres GR
- Le GR 15 : Sentiers de l'Ardenne permet de relier, en 230 km, Arlon à Monschau (Allemagne). Ce sentier de grande randonnée passe notamment par Martelange, Bastogne, Houffalize, Aywaille, Spa et Eupen.