GR 57 : Barchon → Angleur (18 km) - mars 2016
Mise à jour, août 2017 : le GR 57 commence désormais à Liège, à la gare des Guillemins. Le tronçon, décrit ci-dessous, de Barchon au parc de la Boverie, est à présent un itinéraire de liaison permettant, en 14 km, de relier ce sentier de grande randonnée aux GR 5 et GRP 563.
Vers 10 h 30, nous débutons le GR 57, sous le pont de l'autoroute E40 à Barchon ; pourquoi ce GR, un des plus parcourus par les randonneurs, démarre ici ? Quelques mètres plus loin, une simple marque à la peinture, sur un vieux poteau d'éclairage, nous informe que le GR 57 se sépare des GR 5 et GRP 563.
Nous commençons notre périple sur le Sentier de l'Ourthe par un chemin de terre au bord d'un champ. Le terrain devient vite boueux, à cause de travaux d'égouttage le long de la Julienne. Cette petite rivière prend sa source à Retinne et se jette, après un parcours de 11 km, dans la Meuse à Argenteau. Nous traversons une route et poursuivons, en face, dans un sentier encaissé.
Le tracé blanc et rouge emprunte un agréable chemin passant entre le bois des Houlpais et des prairies. Peu à peu, nous découvrons la vallée de la Meuse, et tout d'abord la séparation entre le fleuve et le canal Albert.
Ouvert officiellement à la navigation en juillet 1939, après neuf ans de travaux, le canal Albert a concrétisé un vieux rêve : relier les bassins de la Meuse et de l'Escaut. En unissant le bassin industriel de Liège et le port maritime d'Anvers, tout en desservant les charbonnages du Limbourg, le canal a favorisé l'essor du port de Liège, devenu aujourd'hui le troisième port intérieur européen.
Un étroit sentier nous amène jusqu'à un point de vue, aménagé avec un banc et une table d'orientation. D'ici, on peut voir sur la rive droite de la Meuse : Bressoux, Jupille et Droixhe ; sur la rive gauche : le site de Coronmeuse et en arrière-plan d'anciens terrils ainsi que l'hôpital de la Citadelle. Malheureusement, quelques pylônes électriques viennent un peu gâcher le paysage.
Après ce point de vue, le GR 57 descend, par un sentier entre des prairies, jusqu'à Jupille ; nous quittons provisoirement le sentier de grande randonnée afin de rejoindre le café où nous effectuons la pause de midi.
Le parcours de l'après-midi commence par un sentier grimpant entre deux haies vives. Celui-ci nous fait passer de 85 à 120 mètres d'altitude. À peine sommes-nous arrivés au sommet, que le GR 57 descend entre deux prairies jusqu'à atteindre une petite rue ; il suit celle-ci vers la droite, avant de monter vers le quartier des Bruyères.
Si le soleil est bien présent, le vent frais, lui, nous rappelle qu'il vaut mieux garder le bonnet et l'écharpe. Pendant deux kilomètres, jusqu'au cimetière de Robermont, nous marchons dans un quartier résidentiel... c'est le tronçon le moins intéressant de la journée.
En 1783, pour des raisons sanitaires, il fut décidé de ne plus inhumer à l'intérieur de la cité de Liège. Les quarante à cinquante charniers liégeois ont été fermés, et on ne peut désormais plus enterrer que dans les trois cimetières situés en dehors de la ville, dont celui de Robermont.
Créé en 1805, sur les jardins de l'ancienne abbaye de Robermont, ce cimetière est aujourd'hui, avec plus de 40 hectares, le plus important de la ville de Liège derrière celui de Sainte-Walburge, créé en 1874.
Nous effectuons une petite pause boisson, à proximité du cimetière, à l'abri du vent, avant d'entamer la descente, à travers champs, vers Bressoux. D'ici, on peut voir le quartier de Droixhe et ses nombreux buildings dont la tour « Match » qui, avec ses 98 mètres, est la deuxième plus haute tour de Liège après la tour Kennedy. Sur la droite, on aperçoit les installations de l'usine Jupiler.
Au début du XIXe siècle, la famille Piedbœuf exerçait, à Jupille, la profession de chaudronnier et livrait des chaudières et des cuves aux brasseurs belges et allemands. À cette époque, la région liégeoise comptait de nombreuses brasseries (au moins une par localité) dont la fonction était aussi de fournir des breuvages « sains » (contrairement à l'eau de certaines sources).
Pour profiter de cette demande régionale importante, Jean-Théodore Piedbœuf combina alors son savoir-faire et la très bonne réputation de l'orge et du houblon des collines de Jupille à la pureté de l'eau des sources « Charlemagne ». Il brassa ainsi sa propre bière : la Piedbœuf. Dans les années 1920, Albert Van Damme, originaire de Blankenberge, se marie avec une fille Piedbœuf.
Ce dernier insiste pour que la brasserie familiale se tourne vers les bières de basse fermentation (moins fruitées, moins alcoolisées et à servir plus fraîches). Bien vu : Piedbœuf décolle vraiment ! Dans les années 1950, les bières allemandes commencent à s'introduire dans les cafés. Face à cette nouvelle concurrence, Albert Van Damme prend la décision de brasser une bière de même catégorie.
C'est ainsi que naît la Jupiler, le « er » final devant conférer une consonance plus germanique. En 1966, la Jupiler 5, qui correspond à la bière actuelle, sort des fûts. Il ne lui faut que deux ans pour devenir la deuxième bière belge. En 1987, la brasserie Piedbœuf fusionne avec la brasserie Stella Artois de Louvain (l'ancien ennemi).
Nous suivons brièvement la N642 avant de contourner l'abbaye du Bouhay, transformée aujourd'hui en maison de repos et de soins. Après une centaine de mètres, alors que nous sommes proches de la ville,... surprise ! Un panorama insolite s'ouvre devant nous : des jardins communautaires parsemés de cabanes.
Ici, 200 parcelles sont cultivées par des particuliers habitant les quartiers proches. Sur un kilomètre, nous suivons un sentier longeant ces jardins. Le site pourrait être agréable si les talus n'étaient pas autant envahis de détritus en tous genres.
Nous traversons le quartier d'Amercœur avant de franchir la dérivation. Au milieu du XIXe siècle, la Meuse et l'Ourthe comportaient de nombreux bras qui traversaient la cité ; la navigation y était difficile, et les inondations constituaient une menace permanente. De 1853 à 1863, d'importants travaux ont été entrepris pour rectifier le tracé de ces cours d'eau et créer cette dérivation, presque parallèle au fleuve.
Vers 15 h, nous entrons dans le quartier d'Outremeuse. Ce célèbre quartier liégeois s'est développé dès la construction du premier pont des Arches (fin du XIe siècle) qui reliait la rive droite de la Meuse au quartier de la Cité. Jusqu'au XIXe siècle, ce pont était le seul sur le cours principal du fleuve.
À cette époque, le quartier a littéralement explosé du point de vue démographique et urbanistique. Aujourd'hui, les larges avenues contrastent avec les ruelles et les impasses au tracé moyenâgeux. Nous passons devant l'église Saint-Nicolas, ancienne église du couvent des Récollets, avant d'atteindre l'auberge de jeunesse Georges Simenon.
Georges Simenon, né à Liège en février 1903, a vécu les premières années de sa vie ici en Outremeuse. Son roman « Pedigree » décrit, dans le détail, la vie dans ce quartier au début du XXe siècle et « Le Pendu de Saint-Pholien » fait référence à l'une des deux paroisses du quartier.
D'abord journaliste, auteur sous différents pseudonymes de romans populaires, il créa en 1931 le personnage de Maigret qui le rendit universellement célèbre. Il publia sous son nom plus de 200 romans, 155 nouvelles et 25 textes autobiographiques.
Me retrouvant seul à l'arrière du groupe, j'en profite pour prendre quelques photos et notamment de cette plaque annonçant le GR que nous venons d'entamer. Il nous reste un peu moins de 5 km jusqu'à notre arrivée à Angleur par contre, pour Diekirch, il faudra encore marcher 268 km...
Tchantchès est la figure populaire du quartier d'Outremeuse. D'après une tradition locale, il est né à Liège, de façon miraculeuse le 25 août 760 ; il vint au monde entre deux pavés du quartier d'Outremeuse. C'était un bébé joufflu, goulu, riant sans cesse. Toutefois, Tchantchès boudait à la seule vue de l'eau ; pour le rendre aimable, son père adoptif lui faisait sucer un biscuit trempé dans du péquet.
Rien n'a pu le terrasser, ni l'amour, car il resta célibataire, ni la vieillesse, il s'éteignit à l'âge de 40 ans ! Regretté par toute la population, Tchantchès est resté le prototype du vrai liégeois : mauvaise tête, esprit frondeur, grand gosier, ennemi du faste et des grandes cérémonies, farouchement indépendant, mais cœur d'or et prompt à s'enflammer pour toutes les nobles causes.
Cette sculpture, en pierre et en bronze, montre une monumentale hiercheuse (ouvrière chargée de pousser les wagonnets pour l'évacuation du charbon) présentant la marionnette de Tchantchès. La sculpture constitue un hommage à l'industrie minière liégeoise et aux traditions folkloriques de la cité. Le quartier s'anime chaque année lors des festivités religieuses et populaires du 15 août.
La suite de l'itinéraire se déroule sur les quais le long de la Meuse, sous un beau soleil. Avant de passer sous le pont Kennedy, nous découvrons l'imposante façade (environ 100 mètres) de l'Institut de zoologie. Dans le milieu des années 1870, les anciens instituts de botanique, zoologie, physiologie et anatomie du centre-ville étant à l'étroit dans leurs locaux, l'Université envisage de déménager.
Dans un premier temps, elle souhaite s'installer aux abords du jardin botanique, mais se heurte à l'opposition de la population du quartier. Elle décide alors d'installer son nouvel institut de zoologie, en bordure de Meuse, en face de son bâtiment central situé place du XX août.
Les étudiants prennent possession des locaux en 1894. Après des travaux d'agrandissement et de modernisation, l'Université inaugure, en 1962, le Musée de zoologie et l'Aquarium Dubuisson.
Le GR 57 nous emmène vers le parc de La Boverie qui était autrefois une vaste zone champêtre composée d'îlots et de pâturages (le lieu tire d'ailleurs son nom des bœufs qu'on y faisait paître). Après le réaménagement du réseau fluvial liégeois, l'endroit devint un quartier chic, avec un parc où les bourgeois aimaient flâner.
Le parc et le jardin d'acclimatation sont créés dans la seconde moitié du XIXe siècle. Le parc public a été modifié quelques années plus tard par Blonden qui remplaça les petits bâtiments (aubettes, restaurants, cages à animaux) par des espaces gazonnés plantés d'arbres.
Le parc de La Boverie servit de cadre à l'Exposition Universelle de 1905 où fut construit le Palais des Beaux-Arts, actuel Musée d'Art Moderne et d'Art Contemporain, ainsi que le Cabinet des Estampes.
Par la passerelle Mativa, nous franchissons la dérivation et quittons le parc de La Boverie. Passage à côté de l'église Saint-Vincent, datant de 1930, caractérisée par sa structure en béton et son dôme cuivré, avant de franchir le pont de Fétinne surplombant l'Ourthe.
En attendant de pouvoir traverser la N633, à proximité du pont de Fragnée, nous admirons le monument dédié à Zénobe Gramme. Le buste de l'illustre inventeur de la dynamo-électrique trône au centre ; une femme se tient à côté, ses mains enserrant des palmes glorieuses et des foudres électriques.
En bas, les statues représentent Gramme à 18 ans, quand il exerce son premier métier de menuisier ; et à 40 ans, quand il médite sur sa fameuse invention. Le monument a été inauguré dans le cadre de l'Exposition Universelle de 1905.
Nous finissons l'étape en longeant le canal de l'Ourthe jusqu'au pont Marcotty. Ce site s'apparente à un véritable havre de nature et de calme. Et pourtant, on se situe ici à quelques dizaines de mètres à peine de l'autoroute E25 et du centre commercial de Belle-île.
Le canal Meuse - Moselle est un projet industriel entrepris au début du XIXe siècle. Il devait permettre de relier le bassin de la Meuse à celui du Rhin, via l'Ourthe, la Sûre et la Moselle. Ce projet, soutenu par Guillaume Ier des Pays-Bas, prévoyait la canalisation de 300 à 400 kilomètres de voies navigables et la construction de 205 écluses ainsi qu'un tunnel de plus de deux kilomètres.
Les travaux commencent à divers endroits dès 1827, mais sont rapidement interrompus à cause du manque de fonds et des événements révolutionnaires qui secouent la Belgique. Quand la province de Luxembourg est cédée à notre pays en 1839, le gouvernement belge relance un projet concernant l'Ourthe, non plus dans l'intention de la canaliser, mais de lui créer un canal parallèle.
Ce chantier, à nouveau, ne sera jamais achevé, les pouvoirs publics préférant accorder la priorité au développement des chemins de fer. D'importantes sections de ce canal sont encore visibles entre Liège et Comblain-au-Pont, sur le cours de l'Ourthe où 17 écluses ont été construites.
➔ Jonction avec d'autres GR
- Le GR 5 : Mer du Nord - Méditerranée relie la mer du Nord à la Méditerranée en 2 600 kilomètres. Du nord au sud, il parcourt ainsi les Pays-Bas, la Belgique, le Grand-Duché de Luxembourg, la France où il traverse les Vosges et le Jura, la Suisse près du lac Léman, puis à nouveau la France à travers les Alpes jusqu'à la Méditerranée.
- Le GRP 563 : Tour du Pays de Herve décrit, au départ de Herve, une grande boucle de 160 km à travers cette région de bocages et de haies vives où les traversées de prairies, grâce à des échaliers, sont nombreuses. Ce sentier de grande randonnée passe notamment par Eupen, Eynatten, La Calamine, Plombières, Aubel, Dalhem, Saive, Olne et Soiron.
- Le GR 412 : Sentier des Terrils traverse, sur plus de 300 kilomètres, la Wallonie d'ouest en est. Entre Bernissart et Blegny-Mine, il passe notamment par le Grand-Hornu, l’ancien canal du Centre, le Bois du Cazier et le château de Franc-Waret. Le numéro d'attribution de ce sentier de grande randonnée fait référence au 4 décembre qui est le jour de la fête de Sainte-Barbe, sainte vénérée des mineurs.
- Le GR 121 : De Liège à la Côte d’Opale. Depuis Liège, ce sentier de grande randonnée se dirige vers le château de Jehay et la vallée du Geer pour atteindre Jodoigne. Au-delà de Wavre, il traverse la forêt de Soignes et le centre de Bruxelles avant de passer par Beersel et Ittre. Via Braine-le-Comte, le château de Beloeil et Bernissart, le GR 121 quitte la Belgique. Il évolue ensuite dans les Hauts-de-France jusqu’à la Côte d’Opale.