GR 57 : Angleur → Esneux (16 km) - mai 2016
Info : pour effectuer cette étape de 17 km dont 16 sur le GR, nous avons pris le train entre les gares d'Esneux (900 m hors GR) et d'Angleur.
Lorsque nous descendons du train à la gare d’Angleur, le soleil est déjà bien présent et il ne nous quittera pas de toute la journée. Le parcours commence par la rue du Val Benoît, puis la rue Vaudrée où l’on peut admirer le château Nagelmackers. Celui-ci a été édifié, aux environs de 1720, en briques et calcaire, par le baron de Horion.
Le château tire sa dénomination actuelle de la famille de financiers et industriels Nagelmackers qui occupa les lieux de 1814 jusqu’après la Première Guerre mondiale. Georges Nagelmackers reste dans les mémoires, car c’est lui qui fonda la Compagnie internationale des Wagons-Lits, en 1872.
Après la Grande Guerre, deux acquéreurs successifs envisagèrent de démolir l’édifice pour réaliser un lotissement sur le terrain. Finalement, la commune d’Angleur en acquit la propriété en 1939, et le château fut successivement école communale des filles, caserne des pompiers, maison communale et commissariat de police.
Classé comme monument en 1984, le château Nagelmackers passa à nouveau entre des mains privées. En 1999, il fut inscrit sur la liste de l’Institut du Patrimoine wallon qui, grâce à la bonne volonté de son propriétaire, rechercha des partenaires prêts à investir dans son acquisition et sa réhabilitation.
Le château abrite aujourd’hui un Espace Entreprises de la SPI + ainsi que vingt logements sociaux. Les dernières restaurations (2010) lui ont rendu sa couleur tilleul choisie par Nagelmackers en 1815.
La rue Ovide Decroly nous amène au pied de la principale difficulté de la journée : la montée vers le domaine universitaire du Sart-Tilman. Le premier kilomètre de l’ascension est le plus dur puisqu’il nous fait passer de 73 à 180 mètres d’altitude. Heureusement, cette grimpette se fait sur de petits sentiers, à travers bois.
L’ail des ours, bien présent sur les bords du sentier, dégage sa forte odeur. Cette plante pousse, en masse, dans les endroits ombragés et humides. L'ail des ours, utilisé depuis l'Antiquité pour ses nombreuses vertus médicinales, a des principes actifs identiques à ceux de l'ail commun, mais à des concentrations supérieures.
Nous atteignons la lande de Streupas. Jusqu’au XVIIIe siècle, un ensemble de landes à bruyères parsemait les hauteurs d’Ougrée, Boncelles, Embourg et Beaufays. Ces sols pauvres étaient exploités pour le pâturage des moutons, la fauche et des cultures périodiques.
De 1838 à 1966, les retombées atmosphériques de polluants industriels des usines de zinc de la Vieille Montagne à Angleur ont également contribué à la dégradation du couvert forestier et au maintien de ce type de végétation. L’arrêt des activités polluantes en 1966 a peu à peu permis le retour de la forêt. En 1984, le boisement atteint la quasi-totalité de la lande.
Les multiples intérêts paysagers, culturels et biologiques que présentent les landes à bruyères ainsi que la raréfaction de cet habitat dans la région liégeoise ont conduit l’Université à définir un plan de restauration de la lande à bruyères de Streupas, dès la fin des années 1980. Il vise à rétablir les limites de cet espace, soit une vingtaine d’hectares, par déboisement puis à appliquer une gestion durable destinée à son maintien.
Le GR 57 se poursuit, en léger faux plat, à travers les bois du domaine universitaire du Sart-Tilman pendant six kilomètres. Dans les années cinquante, le recteur de l’Université de Liège veut construire un véritable campus à Liège sur le modèle des campus américains, modernes et intégrés, où les étudiants des différentes facultés peuvent se rencontrer aisément et s'enrichir mutuellement.
Il existait sur les hauteurs de la ville, au sommet des vallées de l'Ourthe et de la Meuse, un domaine boisé de 2 000 hectares : le Sart-Tilman. Cet écrin de verdure menacé par une urbanisation anarchique est, pour le recteur, le site idéal pour édifier l'université liégeoise du XXIe siècle ; une université en accord avec la nature. Les premiers terrains sont acquis en 1958.
Les constructions suivront à partir des années soixante selon un style architectural résolument avant-gardiste. La majeure partie des activités de l'Université de Liège se situe aujourd’hui dans ce campus du Sart-Tilman. Des liaisons efficaces avec le centre-ville, où sont maintenus plusieurs autres sites universitaires, ont été prévues dès l'origine du projet. La conception architecturale et urbanistique du Sart-Tilman vise la parfaite harmonie avec le site naturel, en préservant au maximum les zones boisées.
Une centaine d'œuvres d'art s'intègrent dans le site, constituant le Musée en plein air. Ainsi, les zones d'activités scientifiques, didactiques et hospitalières (avec le CHU), les infrastructures sportives et touristiques s'intègrent harmonieusement avec les parties boisées (plus de la moitié) sillonnées de chemins de promenade, pistes de ski de fond, pistes cyclables ou sentiers d'équitation.
Nous passons à côté de deux œuvres d’art : Imago (2006) d’Émile Desmedt et le Grand Aigle de Francis André. Dans sa conception originale, ce Grand Aigle était mobile : les ailes de l'oiseau, reliées par une chaîne à un flotteur immergé dans un grand collecteur tout proche, se déployaient ou se repliaient au gré de la hauteur des eaux.
Ce dispositif fut cependant mis hors d'usage, en raison du risque possible d'accident dans un environnement ouvert. Le Grand Aigle s'est donc figé dans un envol perpétuel et est devenu un important repère des sentiers de promenade du Sart-Tilman.
Nous traversons le boulevard du Rectorat, près du CHU, et longeons le Royal Golf Club du Sart-Tilman. Officiellement inauguré en 1939, le parcours, dessiné par Tom Simpson, a été réalisé dans un environnement naturel hostile et avec un budget limité. Au prix d’un déboisement de près de vingt hectares, du retrait de 14 000 souches et de l’apport de 5 000 m³ de terre, le défi fut néanmoins relevé.
C’est au niveau de la N663 que nous atteignons le point culminant de cette étape (254 mètres d’altitude). Après la traversée de cette route, le tracé blanc et rouge amorce une première descente en direction de la Roche aux Faucons. Nous profitons d’un banc, au lieu-dit Famelette, pour effectuer la pause de midi.
Nous cheminons, en sous-bois, sur le sentier de la crête jusqu’au point de vue de La Roche aux Faucons. La trouée dans la végétation permet d’avoir une vue plongeante sur un des nombreux méandres de l’Ourthe, la boucle de Fêchereux, 130 mètres plus bas.
Il y a deux millions d’années, l’Ourthe a commencé à creuser son lit sur le plateau du Condroz et s’est progressivement enfoncée jusqu’à son niveau actuel. Le plateau originel montait en pente douce vers l’Ardenne. L’Ourthe, peu encaissée, divaguait et faisait de nombreux méandres en abandonnant quantité d’alluvions : cailloux roulés par le courant, sables, limons,…
Sporadiquement, l’Ardenne et le Condroz se soulevèrent, augmentant la pente. Dans ces périodes de soulèvement, l’Ourthe recreusait activement sa vallée. La Roche aux Faucons est reprise sur la liste des sites classés « patrimoine exceptionnel » par la Région wallonne. Les faucons ont malheureusement déserté cette falaise de calcaire depuis le début du XXe siècle.
Devant nous, sur la rive convexe, le promontoire du hameau d'Ham étale ses terrasses alluviales en pente douce. La rive concave, sur laquelle nous sommes, est abrupte et érodée par les forces vives de la rivière. Nous nous installons sur un banc et profitons pleinement de ce beau panorama ; à quelques pas, un lézard se prélasse au soleil.
Le GR 57 reprend de la hauteur avant de déboucher sur une petite route, à l’entrée d’une propriété privée. Un peu plus loin, nous tournons vers la gauche, sur un chemin de terre, entre des prairies. Nous débutons ensuite la seconde descente de la journée.
Par un large chemin de terre, devenant peu à peu un étroit sentier, nous passons de 233 à 90 mètres d’altitude. Nous atteignons la ferme équestre de Rosière, ancienne demeure des moines qui fondèrent l'abbaye du Val Saint-Lambert.
Sur la gauche, on peut apercevoir la Roche aux Faucons où nous étions 30 minutes plus tôt. Nous suivons les bords de l’Ourthe sur un chemin herbeux, récemment fauchés, puis sur un sentier serpentant au milieu de l’ail des ours.
Le tracé blanc et rouge emprunte, sur 600 mètres, la N638 avant de tourner à droite dans la rue du Parc du Mary. Nous ne prenons pas cette rue, mais continuons sur la grand-route vers la gare d’Esneux (900 mètres hors GR).
➔ Jonction avec d'autres GR
- Le GR 575-576 : À travers le Condroz résulte de la réunion du GR 575 : Tour du Condroz namurois et du GR 576 : Tour du Condroz liégeois en une grande boucle de près de 300 kilomètres.