Les Randos de Fred & Paul

GR 65 : Montréal-du-Gers → Eauze (18 km) - juin 2017

Vers 5 h 30, nous sommes réveillés par les occupants du dortoir voisin. Même si nous aurions aimé dormir encore un peu, le bruit provenant de la salle à manger nous en empêche. Nous descendons donc déjeuner avec ce groupe que nous serons heureux de ne plus revoir par la suite. Maria, la responsable du gîte, est présente ce matin (un peu trop d’ailleurs) ; elle s’inquiète que tout le monde mange suffisamment.

Nous quittons Montréal-du-Gers en descendant vers la D15, puis nous prenons, sur la gauche, une petite route menant au lac de la Ténarèze. Pendant 4 km, nous allons suivre, de plus ou moins près, le ruisseau l’Auzoue. Si la « Ténarèze » est, comme nous l’avons appris les jours précédents, une des trois régions de production de l’Armagnac ; c’est aussi le nom d’une route très ancienne qui sillonnait la Gascogne du nord au sud. Celle-ci suivait les sinuosités de la crête de partage des eaux entre les bassins de la Garonne et de l’Adour. La route restait à l’écart des grandes agglomérations gasconnes d’autrefois, mais faisait étape dans de nombreux villages gersois.

Après ce lac, nous empruntons un chemin de terre, en lisière de forêt, sur 1,2 km. Un peu plus loin, à la « Barrière de Ribère », ancienne maison de garde-barrière, nous empruntons l’assiette d'une voie ferrée désaffectée. Après un kilomètre, nous quittons cet agréable parcours ombragé, à proximité du château de Montaut et d’un lac. Nous passons sous l’ancienne ligne ferroviaire et franchissons l’Auzoue.

GR 65 entre Montréal-du-Gers et Lamothe GR 65 entre Montréal-du-Gers et Lamothe

Le tracé blanc et rouge rejoint la D230 en suivant un chemin empierré au bord d’un champ récemment moissonné. Nous suivons la départementale, pendant 100 mètres, et prenons ensuite un chemin de terre montant au milieu des vignes. Après un bref tronçon caillouteux, nous reprenons notre parcours entre deux parcelles de vignes.

GR 65 entre Montréal-du-Gers et Lamothe GR 65 entre Montréal-du-Gers et Lamothe, au milieu des vignes

Nous passons devant une ferme et continuons, durant 1,5 km, ce parcours entre champs et vignobles. Nous traversons successivement la D29 et la D31 et descendons un chemin goudronné. 500 mètres plus loin, nous empruntons un chemin herbeux et, après avoir franchi une passerelle, nous grimpons vers le hameau de Lamothe.

GR 65 entre Montréal-du-Gers et Lamothe

Il est un peu plus de 10 h et, ayant déjà marché neuf kilomètres, nous nous octroyons une pause à la « Casa d’Elena ». Ce gîte dispose d’une belle terrasse où l’on peut se désaltérer, et même se restaurer (sandwichs, frites,...). Nous y retrouvons nos 4 amis Canadiens ainsi que Christiane, une retraitée effectuant seule le Chemin du Puy-en-Velay à Saint-Jean-Pied-de-Port, que nous avons déjà rencontrée à plusieurs reprises depuis Cahors.

GR 65 : Lamothe, Casa d'Elena

La Tour de Lamothe tient son nom de l'une des deux principales seigneuries présentes au XIIIe siècle sur l'actuelle commune de Cazeneuve. Elle est érigée sur une motte féodale surplombant la vallée de l'Izaute, limite naturelle entre les terroirs de la Ténarèze et du Bas-Armagnac. Cet édifice de guet et défensif est composé de cinq niveaux.

La base est aveugle et servait de réserve ou de grenier à grain auquel on accédait par un escalier intérieur. Le premier niveau devait servir de salle commune dédiée aux gardes. L'accès aux niveaux supérieurs est possible grâce à un escalier à vis qui dessert des pièces plus ouvertes, notamment par des fenêtres trilobées, destinées au seigneur et à son entourage. Le dernier étage est un poste de guet qui offre un panorama à 360°.

GR 65 : tour de Lamothe

Nous passons à côté de l’église et d’une rose des vents, où il est possible d’effectuer une partie de « jeu de l'oie » pour découvrir divers lieux de la Ténarèze.

GR 65 : Lamothe, rose des vents - jeu de l'oie

Le GR 65 descend un raidillon pour rejoindre la plate-forme de l’ancienne voie ferrée qu’il va suivre, sans discontinuer, pendant sept kilomètres ! Ce tronçon, bien qu’un peu monotone, est cependant bien agréable, car il se déroule essentiellement à l’ombre.

GR 65 entre Lamothe et Eauze, ancienne voie ferrée GR 65 entre Lamothe et Eauze, gare de Bretagne d'Armagnac GR 65 entre Lamothe et Eauze, ancienne voie ferrée

Un peu avant 12 h, après avoir franchi la Gélise, nous arrivons à Eauze. Cette rivière prend sa source au nord de Lupiac (Gers) et se jette, après 92 km, dans la Baïse à Lavardac (Lot-et-Garonne). Nous effectuons un petit détour par un supermarché afin d’acheter de quoi manger ce midi et suivons ensuite la D931 jusqu’au centre de la ville.

GR 65 : entrée dans Eauze

Autrefois colonie romaine et capitale de la Novempopulanie, Elusa fut aussi, au IVe siècle, l’un des premiers évêchés. La ville a été détruite pendant le haut Moyen Âge. Au sommet de la colline surplombant les ruines de l'antique cité, un prieuré fut fondé vers 980 et rattaché à l’ordre bénédictin de Cluny. Autour de ce prieuré, dédié à Saint-Luperc, la ville médiévale s'est développée, se protégeant derrière des remparts et des fossés. Au XVe siècle, l’enceinte comprenait un chemin de ronde, un fossé et un double mur dont les blocages étaient de terre. En 1624, Richelieu ordonna la destruction des remparts. Aujourd’hui, les boulevards remplacent les vieux remparts.

En 1467, Jean Marre est nommé prieur du monastère et commence la construction de l’église actuelle, terminée en 1521. Le monument a connu une grande campagne de restauration, entre 1860 et 1878, qui comprenait notamment la réfection de l'enduit intérieur et une modification de la toiture. À cette occasion, les vitraux ont été largement refaits par le maître-verrier élusate Jean-Baptiste Anglade.

En 1972, l'enlèvement de l'enduit intérieur a révélé les chaudes tonalités de l'appareil de pierres et de briques ainsi que le réemploi massif de moellons provenant des ruines de la cité antique d'Elusa. Cette église, voulue par Jean Marre somptueuse comme une cathédrale, a reçu ce titre honorifique de l’évêque du diocèse d’Auch sous le Second Empire ; cette appellation reste symbolique.

GR 65 : Eauze, cathédrale Saint-Luperc

En juin 1579, Henri IV séjourna à Eauze, avec son épouse Marguerite de Valois, dans la maison dite de « Jeanne d'Albret » ; nommée ainsi, parce qu'elle fut achetée par la mère d'Henri IV, Jeanne d'Albret. En effet, cette famille royale s'arrêtait souvent à Eauze lors de ses voyages entre le Béarn et Nérac. La belle façade à colombages est classée aux monuments historiques. Elle était parée de fleurs de lys sculptées qui furent rabotées pendant la Révolution.

GR 65 : Eauze, maison Jeanne d'Albret

Nous décidons de nous rendre directement au gîte « Chez Nadine », situé à environ un kilomètre du centre-ville, sachant qu’il est déjà ouvert (en raison des fortes chaleurs) et d’éventuellement revenir dans l’après-midi pour visiter le reste de la cité. Nous sommes les premiers arrivés et sommes accueillis par Nadine, la responsable du gîte. Celle-ci nous installe dans une chambre à 4 lits où nous espérons être avec Marielle et Roger.

Si nos amis Canadiens nous rejoindrons dans l’après-midi, Nadine décidera de séparer le couple. En effet, afin de ne pas placer Brenda, une randonneuse anglophone, dans une chambre avec un homme ; elle préfère que Marielle loge avec elle et Roger avec nous (plus un autre monsieur : Serge, un sympathique pèlerin de la région parisienne).

En raison de la canicule, nous n’irons finalement pas en ville. Paul jouera, une partie de l’après-midi, à la belote avec une famille de Vendée. Vers 19 h, nous montons à l’étage de la maison pour prendre, autour de la grande table, le repas familial préparé par Nadine : gaspacho à la tomate, quiche à la courgette, cœurs de canards avec des croquettes, glace.

GR 65 : Eauze, gite Chez Nadine

En apéro, nous avons droit à un verre de Pousse Rapière. Ce cocktail doit son nom à la rapière, longue épée légère, ramenée des guerres d’Italie par Monluc et ses capitaines gascons. La liqueur d’armagnac Pousse Rapière, dont la recette ancienne est un secret bien gardé, s’allie avec du vin sauvage (mousseux), méthode traditionnelle, pour donner le cocktail. Pour réaliser cet apéritif, il faut six volumes de vin sauvage pour un de liqueur.

Il existe une autre boisson régionale, tout aussi bonne : le Floc de Gascogne. Cet apéritif doux et frais, qui signifie « bouquet de fleurs » en occitan, a été baptisé ainsi en 1954. C’est un vin de liqueur fruité composé de 2/3 de jus de raisin et d’1/3 de jeune armagnac issu de la propriété sur laquelle il est fabriqué. Produit en rouge ou en blanc, on le déguste frais, entre 5 et 7°, ou tout au long du repas avec du foie gras, des fromages de caractère et des desserts à base de fruits.

GR 65 : Eauze, gite Chez Nadine

C’est après ce bon repas, dans une ambiance très conviviale, et... deux verres d’armagnac que nous descendons nous coucher.