GR 16 : Rochehaut → Vresse-sur-Semois (16 km) - 2022
Peu après 9 h 30, nous commençons cette courte étape qui s’annonce bien vallonnée et éprouvante. Depuis le centre de Rochehaut, nous suivons la N819 et profitons, sur la gauche, d’un beau point de vue sur le village de Frahan situé dans une boucle de la Semois. Comme le méandre du Tombeau du Géant, celui de Frahan figure sur la liste du patrimoine exceptionnel de Wallonie. Suite à ce classement, les deux campings qui se trouvaient au bord de la Semois ont été fermés pour permettre à ce site de retrouver toute son authenticité.
Après 350 m, le GR 16 quitte la route pour descendre, par un large chemin, vers la Semois. Un pont de claies permettait jadis le franchissement du cours d’eau ; depuis 1926, c’est grâce à une passerelle en béton que l’on peut rejoindre le centre de Frahan. Alors que depuis Rochehaut, il faut parcourir environ 9 km en voiture pour rejoindre le village, par le tracé blanc et rouge, nous n’avons marché que 1,5 km !
Nous traversons ce charmant village et prenons, peu après l’église, un sentier montant rejoindre les « crêtes de Frahan ». Pendant environ 1,5 km, nous progressons sur d’étroits sentiers forestiers zigzaguant entre d’impressionnantes masses rocheuses : Ronde roche, rocher des Quatre Fils Aymon,...
Par des escaliers métalliques, nous arrivons sur les ruines du château de Montragut qui daterait du XIIIe siècle. Des fouilles ont permis de dégager des vestiges qui ne sont que des substructions de tours circulaires ; cela laisse penser que le château n'aurait jamais été terminé.
Au-delà du rocher du « Corps de garde », nous descendons jusqu’au bord de la Semois (214 m d’altitude). Le GR 16 franchit un ruisseau et remonte aussitôt un sentier escaladant la colline par de courts lacets. Sans le remarquer, nous passons de la province de Luxembourg à celle de Namur où nous avançons, à flanc de colline, en surplomb de la Semois et d’un vaste camping. C’est sur ce tronçon que nous atteignons le point culminant de l’étape à 365 m d’altitude.
Le chemin forestier s’élargit et s’aplanit un peu avant d’amorcer la descente vers la N945. De l’autre côté de cette route, nous poursuivons la descente dans la rue de l’Opimont. 600 m plus loin, nous prenons un sentier descendant rapidement vers un champ. Peu après celui-ci, à cause de nombreux arbres récemment déracinés, nous perdons le balisage et décidons, par sécurité, de faire demi-tour.
Grâce au GPS, après avoir cheminé dans un quartier résidentiel, nous retrouvons le tracé blanc et rouge à proximité du centre de loisir Récréalle d'Alle-sur-Semois. Nous avançons dans la rue Léon Henrard qui nous amène jusqu’à la N945. C’est au bord de celle-ci, près du pont permettant de franchir la Semois, que nous trouvons un banc pour la pause de midi.
Nous quittons la vallée en grimpant (de 214 à 307 m d’altitude), en lacets, à travers le versant boisé. Tout comme ce matin, le chemin est encombré par des arbres déracinés, mais heureusement, le passage est encore possible moyennant quelques acrobaties. En cours d’ascension, avant de profiter d’un beau point de vue, nous passons à côté d’un monument à la mémoire de James de Liedekerke ; ce jeune résistant, de 22 ans, a été tué le 3 septembre 1944.
Par un large chemin, nous descendons vers Mouzaive où nous découvrons, notamment, un ancien séchoir à tabac. Si le tabac est cultivé dans la vallée de la Semois dès le XVIe siècle, sa culture s'est cependant longtemps limitée à l'usage personnel de l’agriculteur. Peu après 1850, Joseph Pierret plante, à titre expérimental, un are de tabac. La récolte dépasse ses prévisions les plus optimistes : le tabac est d’un rendement exceptionnel et de grande qualité.
La région est, depuis toujours, peu prospère, à cause de son sol pauvre. La culture du tabac est rentable et permet à chacun de vivre décemment. En 1880, à Alle-sur-Semois, seuls 81 ares étaient plantés de tabac. Mais dès 1885, le tabac envahit la vallée de la Semois. En 1905, on dénombre 280 hectares ; en 1910, plus de 400 hectares soit 10 millions de plants de tabac. Le déclin de la culture du tabac dans la vallée commence dès 1952 et aujourd’hui, on ne compte plus que quelques hectares de plantation.
La récolte du tabac a lieu après environ 100 jours. Les plants sont étendus sur le sol où ils fanent pour ne plus être cassants. Ils sont ensuite rassemblés en petits tas et transportés vers le hangar à tabac où ils sèchent de septembre à novembre. Les plants entiers sont accrochés en quinconce sur des bois, appelés boudriots. Aujourd’hui, la plupart de ces anciens hangars servent de lieu d'hivernage pour les caravanes ou pour le stockage du bois.
Le GR 16 franchit successivement la Semois (190 m d’altitude) et la N945 avant de grimper vers le point de vue de Naglémont (340 m d’altitude). Au sommet de cette côte, de 700 mètres, nous sommes contents de trouver un banc pour nous reposer quelques minutes tout en profitant du paysage.
Par des chemins forestiers, nous nous dirigeons vers Chairière que nous atteignons après 1,3 km. Ce village est constitué de deux noyaux d'habitat relativement distincts : Petite Chairière, le plus ancien et le plus pittoresque, qui relevait sous l’Ancien Régime de la prévôté d’Orchimont et Grande Chairière qui dépendait du duché de Bouillon.
De l’autre côté de la N945, nous passons près de l’église de Petite Chairière qui est la plus typique de toute la région ; c’est la seule à être encore entourée de son cimetière. Un peu plus bas, nous découvrons la fontaine Saint-Walfroid qui comprend le lavoir et un abreuvoir. Jadis, pratiquement chaque village possédait son lavoir dont l’usage était exclusivement réservé au lavage du linge. Ces points d’eau ont été aménagés dans la seconde moitié du XIXe siècle, suite à l’épidémie de choléra.
À la sortie du village, après un raidillon, nous évoluons, pendant 1,3 km, dans les « Crêtes », une suite de collines aux arêtes aiguës qui dominent les deux Chairière et les séparent des villages de Laforêt et Vresse.
Nous descendons (de 298 à 180 mètres d’altitude) vers la Semois que nous longeons brièvement. Par le pont Saint-Lambert, nous arrivons au centre de Vresse-sur-Semois où nous terminons, vers 17 h, cette étape. Ce pont, dont la dernière reconstruction remonte à 1774, franchit le ruisseau de Petit-Fays tout près de son embouchure. Bien avant l’existence du grand pont sur la Semois, il facilitait par la rive droite, l’accès à un gué situé en amont et menant directement au village de Laforêt.
Le petit pont de pierre, aux trois arches irrégulières, n’est accessible qu’aux piétons, cyclistes et cavaliers. On raconte que l’étroitesse du tablier du pont a été voulue par Saint Lambert, patron de Vresse, pour empêcher Sainte Agathe, patronne de Laforêt, qui ne se déplaçait apparemment qu’en voiture, de venir propager la foi chrétienne sur ses terres !