Krijtlandpad : Maastricht → Noorbeek (24 km) - novembre 2016
Info : pour effectuer cette étape, nous avons pris le bus entre Noorbeek (Dorpstraat) et Maastricht (Station).
Au départ de la gare de Maastricht, le balisage jaune et rouge nous mène d’abord, le long de la Stationsstraat, vers le pont Saint-Servais ; considéré comme le plus ancien pont des Pays-Bas. En l'an 57 avant J.-C., les Romains ont construit un premier pont au croisement des routes Cologne - Bavay et Nimègue - Trèves. Pour protéger ce pont, ils ont bâti une forteresse qui a reçu le nom de « Mosae Trajectum » : où les gens peuvent traverser la Meuse ; qui deviendra plus tard Maastricht.
Suite à l’effondrement du pont, en 1275, lors d'une procession, le Chapitre de Saint-Servais a ordonné la construction d’un nouveau pont. Celui-ci comptait neuf arches en pierre et une portion en bois du côté du Wyck (quartier où nous sommes). Cette dernière était destinée à être rapidement démontée en cas de siège. En 1932, le pont a été complètement reconstruit. Cependant, en raison de l'augmentation du trafic maritime, les deux arches du côté du Wyck ont été remplacées par une section de levage en acier.
Juste avant le pont Saint-Servais, le Krijtlandpad tourne à gauche et s’en va suivre la Meuse. Nous découvrons quelques vestiges, restaurés ou reconstitués, des remparts médiévaux qui ceinturaient jadis la ville, dont la Maaspunttoren. Cette tour, qui à partir de 1318 faisait partie du mur d’enceinte, a été reconstruite en 1913 après avoir été démolie en 1869. Un peu plus loin, nous passons au pied du Bonnefantenmuseum, à la silhouette assez particulière, qui abrite un musée d'art ancien et contemporain.
Au-delà du pont Kennedy, nous apercevons une étrange construction, toute en briques, au milieu d’une île sur la Meuse. Il s’agit du siège du parlement de la province du Limbourg. C’est dans ce bâtiment que fut signé, le 7 février 1992, le traité de Maastricht. Ce traité est le deuxième acte fondamental de la construction européenne après le traité de Rome du 27 mars 1957.
Après un passage dans la réserve naturelle « De Kleine Weerd », nous suivons, pendant deux kilomètres, la Hoge Weerd, une route très fréquentée parallèle à la Meuse. Ce parcours, totalement plat, s’effectue tantôt sur des sentiers herbeux, tantôt sur la piste cyclable, bien aménagée, longeant la route. Sur notre droite, de l’autre côté de la Meuse, se dresse la Montagne Saint-Pierre (Sint-Pietersberg). Ce massif est principalement constitué de sédiments accumulés par la mer qui recouvrait la région, il y a 65 millions d'années.
La Montagne Saint-Pierre revêt un intérêt biologique remarquable, car elle réunit des conditions de climat et de sols tout à fait exceptionnels qui permettent à des végétaux et à des animaux à caractère méridional de survivre dans notre région. La flore offre, par exemple, une grande variété d'orchidées très rares, alors que la faune se singularise par la présence d'une multitude d'insectes rares, de rapaces tant diurnes que nocturnes ou encore de quatorze espèces différentes de chauves-souris. Ces dernières profitent des galeries souterraines existantes pour leur hibernation. Les pratiques agropastorales ancestrales sur les versants crayeux ont modelé un couvert végétal particulier, les pelouses sèches, dont la biodiversité est exceptionnelle.
Dans la région, l’exploitation séculaire de la marne a donné naissance à un impressionnant réseau de galeries souterraines. La marne, que l'on nomme aussi tuffeau ou pierre de France, sera utilisée, jusqu'au milieu du XXe siècle, pour construire de nombreux bâtiments. Les dernières exploitations de blocs de marne en activité sont destinées à la restauration des bâtiments anciens. La région compte encore des dizaines de carrières de marne, de craie et de silex à ciel ouvert en vue de la production de chaux (ciment). Aux Pays-Bas, cette production est assurée par ENCI (Eerste Nederlandse Cement Industrie), et en Belgique par la CBR et Obourg. Dès que l’exploitation d’une des carrières cesse, la nature reprend ses droits de manière spectaculaire.
Nous abordons ensuite le moins beau tronçon de l’étape puisqu’il se déroule sur l’asphalte dans ce qui deviendra prochainement un zoning industriel. Heureusement, après 1,5 km, nous retrouvons un chemin caillouteux progressant entre des prairies et des vergers. Celui-ci se rapproche de la ligne de chemin de fer Liège - Maastricht qu’il finit par rejoindre et suivre sur 200 mètres.
À hauteur d’un passage à niveau, nous tournons à droite vers Oost-Maarland. À la sortie de ce village, nous empruntons, sur 500 mètres, la Kasteellaan qui longe l’ancien château d’Oost. Ce dernier, bien caché derrière une épaisse végétation, appartenait jadis au comté de Dalhem.
Au bout de cette ligne droite, nous pénétrons, par un portillon, dans la réserve naturelle « Eijsder Beemden » composée de prairies, de mares, de saussaies et d’un ancien verger à haute tige. Pendant un peu plus d’un kilomètre, nous progressons sur des chemins herbeux passant au milieu de ce bel environnement. Tout au long de l’année, l’ensemble du site (tout comme De Kleine Weerd où nous étions tout à l’heure) est pâturé par un troupeau de chevaux Konik et de vaches Galloway. Ces animaux, parfaitement adaptés à la vie en pleine nature, contribuent au maintien de ce paysage naturel. La grande variété du sous-sol et des conditions orographiques, l’influence du pâturage et surtout de la Meuse concourent à créer un biotope idéal, gage d’une grande richesse faunistique et floristique.
Un peu avant midi, nous atteignons Eijsden où nous effectuons, près de l’église, la pause pique-nique. De 1794 à 1814, ce charmant village a appartenu au département français de la Meuse Inférieure. Puis, avant l’établissement d’une frontière définitive entre les Pays-Bas et la Belgique, en 1839, Eijsden fut, pendant neuf ans, une commune belge. Si c’est actuellement la Meuse qui marque la frontière entre les deux pays, on peut cependant voir, au bord du fleuve, une ancienne borne frontière.
Sur la place d’Eijsden, nous découvrons une sculpture représentant six personnes dansant le « Cramignon ». Cette danse traditionnelle se pratique essentiellement dans les localités au nord de Liège, comme Visé, Dalhem et dans la vallée du Geer. Le cramignon est un serpentin ondoyant de danseurs, avec, à la tête, un meneur, le capitaine, souvent armé d'un bouquet de fleurs. L'origine de ces longues danses, dans la région liégeoise, semble remonter au XIIIe siècle. À l'occasion de la fin des moissons, on organisait des fêtes de village. Les cramignons offraient un prétexte aux jeunes des différents villages de se rencontrer, et pour la plus grande joie des parents, de se marier.
Après cette pause, nous nous dirigeons vers le château d’Eijsden dont le parc est libre d’accès. Arnold de Lamargelle est celui qui fit construire, en 1636, l’édifice de style Renaissance mosane. Le château est longtemps resté dans sa famille avant que le comte Van Hoensbroek n'en hérite et qu’il se retrouve par la suite entre les mains d'Hubert de Geloes ; il appartient aujourd’hui à la famille de Liedekerke. Le château, entouré de douves, a été reconstruit en 1767 et restauré en 1881-1886. Il se compose de deux ailes perpendiculaires reliées par une tour d'angle flanquée d’une étroite tour d'escalier. Le parc a été construit vers 1900 par le français Achille Duchêne, célèbre architecte de jardin, en remplacement d'un parc de la fin du XVIIIe siècle.
De retour sur le tracé jaune et rouge, nous empruntons une allée bordée de hêtres pourpres avant un nouveau tronçon asphalté, peu intéressant, de deux kilomètres. Sur ce trajet, nous franchissons, au niveau de la gare d’Eijsden, la ligne de chemin de fer Liège - Maastricht, puis nous nous dirigeons, à travers des quartiers résidentiels, vers l’église de Mariadorp. Le village a été construit pendant la Première Guerre mondiale pour héberger le personnel de l'usine de zinc blanc d’Eijsden. L’église qui ressemble plus à un bâtiment industriel qu’à un édifice religieux, a été consacrée en octobre 1960.
Nous passons par-dessus l’autoroute E25 et peu après, la partie vallonnée et campagnarde de l’étape commence. En suivant un chemin de terre, dénommé « Ezelsweg » : chemin des ânes, nous montons, en un kilomètre, de 75 à 118 mètres d’altitude. Depuis le chemin herbeux, en bordure de champs, nous profitons d’un beau point de vue sur la vallée de la Meuse et ses cimenteries.
Près du sommet, un poteau nous informe que nous nous séparons du GR 128 : Vlaanderenroute (qui nous accompagnait depuis le début de l'étape) ; ce sentier de grande randonnée relie, sur 680 kilomètres, Wissant (en France) à Aachen. Au même endroit, nous croisons le tracé du Pelgrimspad avec qui nous cheminerons durant 2 km. Ce sentier de grande randonnée, en lien avec le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, relie en 470 km Amsterdam à Visé.
Les deux GR descendent un chemin creux et contournent un des nombreux vergers hautes tiges présents dans la région. Au niveau d’un camping, nous quittons le tracé du Pelgrimspad pour poursuivre « seul » les sept derniers kilomètres. Le Krijtlandpad reprend son ascension, de 84 à 126 mètres d’altitude, sur un chemin herbeux entre des terres cultivées.
Nous passons à côté de trois campings avant de redescendre légèrement, au milieu des prairies, vers un petit bois. Juste avant ce dernier, nous tournons à droite et suivons, durant 1,5 km, d’agréables chemins tantôt campagnards, tantôt forestiers. C’est après avoir monté le Trichterweg que nous atteignons, vers 15h, Mheer (170 mètres d’altitude).
En empruntant la rue principale du village, nous passons devant l’église Saint-Lambert. Juste derrière celle-ci se dresse le château de Mheer, auquel on accède par un chemin pavé. Une mention écrite, datant de 1314, indique qu’une « maison en pierre » appartenait alors à Willem van Mere. En 1668, la famille De Loë hérita du château ; c’est toujours celle-ci qui le possède et qui y réside.
L’ensemble se compose d'un château principal et d'une ferme. La maison en pierre mentionnée en 1314 est probablement l'aile ouest actuelle du château ; la tour ronde aurait cependant des fondations plus anciennes. Dans la seconde moitié du XIVe siècle, l'aile nord a été construite et, au XVIe siècle, l'aile est. L'aile sud date du premier quart du XVIIe siècle, mais a été modifiée, entre 1918-1923, dans le style anglais. Seule la cour d’entrée est librement accessible au public.
C’est en suivant le Papenweg, une route devenant un chemin de terre, que nous quittons Mheer. Un peu après une ferme, nous atteignons le point culminant de cette étape (179 mètres d’altitude). Il ne nous reste plus qu’à descendre vers Noorbeek en suivant divers sentiers passant entre des prairies.