Les Randos de Fred & Paul

Nous voici de retour à Conques, deux ans plus tard, pour poursuivre notre périple sur le GR 65. Si nous avons beaucoup apprécié la méthode choisie la dernière fois pour effectuer le parcours : logement fixe pour 3 - 4 jours et deux voitures ; nous avons choisi cette année d'effectuer le Chemin de manière plus « traditionnelle ».

Le seul petit confort que nous nous accordons, c’est le portage de nos bagages qui sera effectué par la société la Malle Postale ; nous n’aurons ainsi sur le dos que notre « petit » sac pour la journée.

16 h 15, nous garons la voiture sur un des parkings de Conques (nous la récupérerons dans une semaine) et descendons à pied en direction de l’hôtellerie de l’abbaye Sainte-Foy. Nous pénétrons avec nos deux valises et nos sacs à dos dans le hall d’accueil où deux dames sont installées derrière une table.

Nous expliquons que nous avons une réservation, mais elles ne nous écoutent pas et nous font sortir dans la cour pour y déposer nos bagages. Ceci étant fait, nous revenons auprès de ces deux dames qui à présent veulent bien nous écouter. Un petit papier nous est remis avec tous les horaires qu’il est conseillé de bien respecter !

Conques, hébergement abbaye Sainte-Foy

Retour dans la cour extérieure où nous devons laisser nos chaussures sur une étagère. Débute ensuite l’opération « prévention punaises de lits » : chaque valise est mise dans un grand sac plastique par un hospitalier, puis se rendant soudain compte que nous avons aussi des sacs à dos, ils retirent nos valises des sacs plastiques pour finalement y mettre les sacs à dos.

Il nous est, à présent, interdit de sortir nos sacs à dos des sacs plastiques ! Les valises, elles, sont aspergées d’un spray supposé empêcher l’entrée des fameuses punaises de lits. À chaque gîte correspondra une méthode différente pour se prémunir de cet insecte indésirable...

Conques, hébergement abbaye Sainte-Foy

Cette opération fastidieuse accomplie, un hospitalier nous invite à le suivre vers le dortoir qui nous a été attribué. Nous montons un très bel escalier en pierre et découvrons, au premier étage, notre dortoir composé de 16 places réparties en 8 lits à deux niveaux.

Étant les derniers arrivants, nous devons nous contenter des deux places restantes. Je dormirai d’un côté de cette grande pièce sur un lit du bas et Paul, à l’autre bout du dortoir, sur un lit du haut. Après avoir installé notre couchage, nous allons prendre notre douche dans la vaste salle des sanitaires.

À 19 h précise, la cloche annonçant le dîner retentit. Nous prenons place dans une belle et grande salle ; nous sommes une soixantaine à passer la nuit à l’abbaye. Depuis 1992, une communauté de frères de Mondaye accueille les nombreux pèlerins. Le frère Cyril nous explique qu’ils sont actuellement six frères aidés par quelques hospitaliers (généralement d’anciens pèlerins venus aider la communauté pour 10 - 15 jours).

Avant que le repas ne nous soit servi, nous entonnons tous l’Ultreia, le chant des pèlerins. Pour 12 €, nous avons droit à un très bon repas : potage, pâtes froides au saumon, gratin de tomates et aubergines, plateau de fromages, tarte au chocolat ; le tout arrosé avec la Cuvée des Pèlerins.

Conques, hébergement abbaye Sainte-Foy

À 20 h 30, nous nous rendons dans l’abbatiale pour écouter les complies et assister à la bénédiction des pèlerins. Le meilleur moment de la soirée se passe vers 21 h : la présentation du tympan par le frère Jean-Daniel. D’une manière très théâtrale, il nous explique en détail ce magnifique tympan ainsi que l’histoire de sainte Foy. Nous écoutons brièvement le concert d’orgue donné dans l’abbatiale avant d’aller nous coucher.

Conques, présentation du tympan de l'abbatiale par le frère Jean-Daniel

GR 65 : Conques → Livinhac-le-Haut (26 km) - juin 2016

6 h 30, le dortoir se réveille doucement ; pour nous, cette première nuit n’a pas été réparatrice, car il faisait trop chaud et les nombreux bruits étaient assez gênants : grincements des lits à chaque fois que quelqu’un se retournait. Nous descendons prendre le petit déjeuner avant de nous préparer pour cette première étape.

Une hospitalière nous indique la pièce (tout en haut du bâtiment) où laisser nos valises afin que la Malle Postale puisse venir les chercher. C’est à 8 h 30 que nous commençons cette étape qui ne sera pas de tout repos !

Nous descendons la rue Charlemagne et passons sous la Porte du Barry, puis nous franchissons le Dourdou sur un très beau pont datant de 1410. Ce dernier est dit pont romain à cause d’une mauvaise francisation du mot « Romieu » qui qualifiait, en langue d’oc, les pèlerins. À cause des nombreuses averses de ces derniers jours, l’eau a une teinte très brune.

Conques, pont sur le Dourdou

Un panneau nous annonce Decazeville à 5 h de marche et Noailhac à 2 h 15, mais nous ne passerons pas dans ce second village, car nous prendrons une variante... Hier soir, le frère Cyril nous avait dit : « À Conques, la descente est périlleuse et la montée douloureuse ! ». Il avait bien raison, car pendant un kilomètre, nous allons grimper pour passer de 235 à 435 mètres d’altitude.

Cette bonne grimpette se fait sur un petit sentier rocailleux (parfois glissant) au milieu d’une végétation luxuriante. Au milieu de cette ascension, se trouve la chapelle Sainte-Foy construite, selon la légende, à l’emplacement où le moine, ramenant d’Agen les reliques de sainte Foy (IXe siècle), tomba épuisé.

C’est alors que la sainte, en songe, lui demanda : « Veux-tu du vin pour un jour ou de l’eau pour toujours ? ». Optant pour l’eau, il frappa le rocher de son bâton. Depuis ce jour, en contrebas de la chapelle, coule une source aux vertus curatives et bienfaisantes. Les anciens y venaient en pèlerinage et se frottaient les yeux avec cette eau, dans l’espoir d’une guérison.

Conques, montée vers la chapelle Sainte-Foy Conques, chapelle Sainte-Foy

D’ici, on jette un dernier regard sur le village et on comprend mieux pourquoi l’empereur Louis le Pieux, qui fonda le monastère en 819, lui octroya ce nom. En effet, Conques se niche dans un site naturel en forme de coquille (concha en latin). Selon la tradition, nous faisons sonner la cloche de la chapelle et poursuivons la montée dans la forêt.

Vue sur Conques depuis la chapelle Sainte-Foy

La sortie de la forêt ne signifie pas que nous sommes arrivés au sommet, car nous devons encore monter pour atteindre 545 mètres d’altitude, mais ce tronçon est moins rude. Nous cheminons à présent au milieu des bruyères et des fougères.

GR 65 entre Conques et Noailhac

Contrairement à beaucoup de randonneurs, nous optons pour la variante par le GR 6 qui, bien que plus longue de deux kilomètres et nettement plus vallonnée, est bien plus belle. Cette variante passe sur des sentiers et des chemins forestiers tandis que le GR 65 emprunte une départementale pendant 5 km !

GR 65 : variante Noailhac - Decazeville

Nous descendons par un chemin de terre, entre des prairies, avant de circuler sur un agréable chemin forestier, en partie herbeux, pendant deux kilomètres. Nous prenons brièvement la D606 pour gagner le hameau des Clementies. Nous passons encore dans d’autres hameaux, mais à l’exception de sept ânes dans un pré, nous ne verrons personne.

Variante du GR 65 entre Conques et Prayssac Variante du GR 65 entre Conques et Prayssac Variante du GR 65 entre Conques et Prayssac

En quittant le hameau d’Eynies, nous entamons un très beau parcours descendant vers le ruisseau de la Brousse. Nous franchissons le cours d’eau et découvrons que nous sommes ici sur la méridienne verte : cette création de l’an 2000 matérialise par des arbres, entre Dunkerque et Barcelone, le tracé du méridien de Paris. Celui-ci est également incarné par des médaillons métalliques installés dans les communes traversées par la ligne.

Ruisseau de la Brousse et Méridienne verte

Comme nous sommes au fond du vallon, il faut bien entendu tout remonter ! C’est par des petits sentiers, au milieu d’une riche végétation, que nous quittons cette charmante vallée. Le GR 6 traverse la D183 avant de se diriger vers Prayssac.

Variante du GR 65 entre Conques et Prayssac

Dans ce hameau, nous sommes accueillis par Jean-Luc qui a installé, dans l’ancien four communal, une halte où l'on peut se restaurer. Nous retrouvons, installés autour de la table, trois Américains que nous avions aperçus hier soir à Conques. Si j’ai bien compris, il s’agit du père et de ses deux fils adolescents qui font cette année le Chemin entre Le Puy et Roncevaux après avoir effectué l’an dernier le Camino Francès.

Nous goutons au gâteau maison (un peu sec) mais refusons le potage et autres boissons proposées par le tenancier. En partant, Jean-Luc, qui retient les prénoms de toutes les personnes qui passent devant chez lui, entonne le chant « Ultreia ». Nous avons appris le décès de Jean-Luc en février 2018.

Prayssac : halte chez Jean-Luc

Nous reprenons notre périple en direction du hameau de Roumègous avant de rejoindre une petite route ; celle-ci nous mène au point culminant de cette étape, à 580 mètres d’altitude. Sur la D580, le GR 6 retrouve le GR 65, venant de Noailhac, et chemine avec lui vers Decazeville.

Un panneau nous informe qu’à partir d’ici, et jusqu’au hameau de Saint-Roch (après Decazeville), nous pouvons soit suivre le balisage blanc et rouge, soit emprunter le chemin des crêtes. Ce dernier permet de raccourcir l’étape d’un kilomètre, mais surtout de zapper la longue descente vers Decazeville et aussi la rude montée pour en sortir.

Nous optons pour le tracé du GR, car nous préférons avoir une étape un peu plus longue, mais marcher sur des sentiers ou chemins de terre ! Le passage par Decazeville est perçu par certains comme purement commercial, car le Chemin de Compostelle originel n’y passait pas. À chacun son choix de l’itinéraire...

Chemin des crêtes ou GR 65 par Decazeville ?

Une petite bruine nous oblige à enfiler temporairement la cape. Nous suivons un chemin herbeux, entre des champs, puis de charmants sentiers au milieu des hautes herbes. Pour l’instant, nous ne regrettons absolument pas notre choix de parcours.

Nous laissons le GR 62b s'en aller vers la gauche en direction de Toulouse puis, un peu à l’écart du parcours, nous effectuons la pause pique-nique : assis par terre dans un bosquet.

GR 65 vers Decazeville GR 65 vers Decazeville

Un dernier sentier suivi d’un passage à côté d’une ferme et nous arrivons sur une petite route que nous allons suivre pendant près de 4 km. La descente sur Decazeville n’a rien de bien passionnant avouons-le. De temps à autre, nous avons un point de vue sur cet ancien bassin minier.

Decazeville

La ville a été appelée Decazeville, au XIXe siècle, en souvenir du duc Decazes qui fut le promoteur de l’industrie minière de ce bassin houiller. Dès le XVIe siècle, on transportait le charbon, extrait ici, vers Bordeaux par le Lot et la Garonne. Au début du XXe siècle, la mine employait plus de 9 000 ouvriers et fabriquait plus d’un million de tonnes de fonte par an. Aujourd’hui, il ne reste pratiquement rien de cet âge d’or.

Le GR 65 reste en périphérie de la ville et nous en ferons de même, car nous avons encore 5 km à parcourir. Nous sommes à présent à 207 mètres d’altitude et, contrairement à ce que croit une randonneuse rencontrée sur un banc, les difficultés ne sont pas terminées ! Une forte montée sur l’asphalte nous attend pour atteindre le hameau de Saint-Roch, à 346 mètres d’altitude.

GR 65 entre Decazeville et Livinhac-le-Haut

Nous visitons la charmante chapelle, datant de 1785, construite pour éviter aux paroissiens de devoir traverser le Lot pour se rendre aux offices religieux à Livinhac-le-Haut. En effet, avant que n’existe un pont pour franchir la rivière, un jour que le courant était très fort, un cortège funèbre qui se rendait à Livinhac-le-Haut chavira et la rivière emporta tout le monde.

Livinhac-le-Haut, chapelle Saint-Roch Livinhac-le-Haut, chapelle Saint-Roch

Un peu plus loin, nous amorçons la descente sur Livinhac-le-Haut, à 200 mètres d’altitude. Le sentier d’abord étroit s’élargit peu à peu, mais certains passages sont légèrement boueux.

GR 65 vers Livinhac-le-Haut

Nous passons le pont sur le Lot et nous nous dirigeons vers l’église pour finalement atteindre le gîte, un peu après 15 h. Nous sommes accueillis par Nathalie, la gérante du gîte communal, qui nous conduit dans une chambre à 2 lits... ça nous changera de la nuit précédente !

Contrairement à Conques, ici, nous ne pouvons pas amener nos bagages dans la chambre. Il faut laisser ses affaires dans un local et mettre ce dont on a besoin dans des bacs jusqu’à la chambre ; de plus, des draps nous sont fournis.

Livinhac-le-Haut

Nous nous rendons au restaurant de la Mairie où nous retrouvons une dizaine de pèlerins dont les trois Américains. Nous sommes attablés avec un couple de Caen avec qui nous discutons tout le repas. Pour 13 € (vin non compris), nous avons une belle assiette : hampe d’Aubrac, salade, taboulé, pommes de terre rissolées. Après un morceau de fromage Saint-Nectaire, nous dégustons une délicieuse croustade aux pommes.

Nous essayons de profiter un peu de la terrasse du gîte avant d’aller nous coucher, mais s’y trouve déjà un Allemand occupé à téléphoner. Nous apprendrons plus tard qu’il s’appelle Klaus et qu’il est parti sur le Chemin au moment de sa retraite. Parti de chez lui en direction de Saint-Jacques-de-Compostelle, il compte aussi faire le trajet du retour... si tout va bien, il reviendra chez lui pour les fêtes de Noël !

Livinhac-le-Haut, gite communal

Plan du parcours