Les Randos de Fred & Paul

GR 14 : La-Roche-en-Ardenne → Tenneville (21 km) - mai 2018

Peu avant 10 h, nous arrivons à La Roche-en-Ardenne pour entamer cette étape, avec une météo qui s’annonce chaude et ensoleillée. Nous longeons d’abord l’Ourthe, sur 600 mètres, et admirons, sur l’autre rive, les ruines du château qui domine la ville et surveille une boucle de la rivière.

Sur l’éperon rocheux, à l’emplacement du château actuel, les anciens Belges ont construit un oppidum. En l’an 57 avant J.-C., l’Ardenne dut se soumettre au joug de l’envahisseur romain qui bâtit un fortin à la place de l’oppidum. Au VIIIe siècle et sous l’occupation franque, Pépin de Herstal fit du fort romain une maison de chasse. Le premier véritable château a été érigé au IXe siècle et connut son apogée entre le XIIe et le XVIIe siècle.

Les troupes de Louis XIV ayant investi La Roche en 1681, d’importants travaux de transformation du château sont alors effectués sous la conduite de Candeau, disciple du célèbre architecte militaire Vauban. On creuse des souterrains, on recouvre de terre une partie de la forteresse pour supporter les attaques d'artillerie et on construit des logements pour la garnison.

En 1721, le château est gravement endommagé par un incendie, à la suite de quoi, Joseph II d'Autriche le fait démanteler. Il sert ensuite de carrière aux habitants qui y trouvent de beaux et solides matériaux de construction. L'État belge le rachète en 1852 pour assurer sa sauvegarde.

La Roche-en-Ardenne, ruines du château

Une légende raconte que, tandis que le seigneur de La Roche voyait son âge avancer, sa fille unique et héritière, la jeune et blonde comtesse Berthe, n’avait pas encore pris époux. Il lui proposa donc d’organiser un tournoi dont le vainqueur remporterait la main de la jeune femme. Or, lors d’une promenade non loin du château, le cheval de Berthe trébucha, mettant l’héritière en péril, mais heureusement, une poigne ferme redressa l’animal.

Cette main salvatrice, c’était celle du comte Waleran de Montaigu. Les deux jeunes gens tombèrent amoureux, ce qui attrista Berthe qui avait accepté le principe du tournoi ! Waleran promit de le gagner, sans toutefois avouer à Berthe qu’il était aussi, de son côté, promis à Marie de Salm !

De fait, Waleran sortit vainqueur du tournoi et sa victoire allait être proclamée quand un chevalier noir demanda d’entrer en compétition ; fatigué, Waleran échoua et fut emmené pour mort, alors qu’il n’était qu’abasourdi. L’anonyme chevalier noir fut donc uni à Berthe.

À l’issue du banquet nuptial, tandis que les époux s’étaient retirés dans leur chambre, on entendit un cri et l’on retrouva Berthe morte, au pied du donjon, un poignard aux armes de Salm planté dans le cœur… le chevalier noir n’était autre que Marie de Salm qui s’était ainsi vengée et aurait, pour cela, vendu son âme au diable. Depuis lors, le fantôme de Berthe hante le château les nuits de grand vent.

La Roche-en-Ardenne, ruines du château

Le 10 septembre 1944, la ville est libérée par les forces alliées. Bientôt, la riposte s'organise : l'offensive des Ardennes est lancée et, le 21 décembre 1944, les Allemands font une fois de plus leur entrée dans La Roche. Du 21 décembre 1944 au 11 janvier 1945, La Roche est bombardée de 70 000 obus américains. Ces évènements causent la mort de 114 civils, 350 immeubles sont détruits et 327 endommagés.

Le 11 janvier 1945, les Highlanders du 30e corps britannique, sur la rive gauche de l'Ourthe, et les Américains de la première armée, sur la rive droite, libèrent définitivement La Roche. Dans la ville, on peut découvrir un tank Sherman M4A1 américain et un tank destroyer M10 britannique.

La Roche-en-Ardenne, char britannique

À la sortie de la ville, le GR 14 suit la N89 sur une centaine de mètres et prend, au premier carrefour, la direction du moulin de la Strument. Nous atteignons cet hôtel - camping, après un parcours de 500 mètres sur l’asphalte. Si jusqu’ici le tracé blanc et rouge se déroulait à plat, nous allons à présent affronter la côte du jour ; en un kilomètre, nous passons de 245 à 375 mètres d’altitude.

GR 14 entre La Roche-en-Ardenne et Journal

Près du sommet, nous dépassons le lieu-dit « Grande Strument » et poursuivons, dans la même direction, sur un sentier forestier. Nous continuons en lisière du bois puis, dans la campagne, sur un chemin agricole, vers le village de Hives. Là, malheureusement, nous réalisons qu’une course de VTT a lieu aujourd’hui et que, pendant 2 km, nous aurons ces cyclistes dans notre dos.

GR 14 entre La Roche-en-Ardenne et Journal

Nous descendons un chemin caillouteux, d’abord entre les prairies, puis dans les bois et rejoignons une petite route. Avant d’attendre cette dernière, nous croisons une dame occupée à s’énerver (en néerlandais) et à faire de grands gestes envers les cyclistes, et nous aussi par la même occasion. On se trouverait apparemment sur sa propriété et un morceau du chemin serait donc privé...

GR 14 entre La Roche-en-Ardenne et Journal

Le tracé blanc et rouge suit la route, vers la droite, sur 300 mètres, et la quitte pour monter un chemin forestier (de 330 à 410 mètres d’altitude). Dans un virage, pour notre plus grand bonheur, nous nous débarrassons des VTT et pouvons continuer notre périple plus sereinement.

Après environ deux kilomètres, nous quittons la forêt pour évoluer à découvert. Avant la première maison du hameau de Lavaux, nous tournons à droite vers un bois. Pendant 4,5 km, nous progressons au milieu des bois et trouvons, au début de ce tronçon, une aire de pique-nique convenant parfaitement pour la pause de midi.

GR 14 entre La Roche-en-Ardenne et Journal GR 14 entre La Roche-en-Ardenne et Journal

Dans une descente, nous découvrons la « Croix des Maquisards ». En mai 1944, 23 jeunes du MNB (Mouvement National Belge), qui refusent de travailler pour l'industrie allemande, quittent leur maison respective pour construire un camp où ils vivent pendant un mois sans incident notable. Le 23 juin, à 4 h 30 du matin, 150 soldats allemands lancent une attaque d'encerclement contre ce camp ; sans aucune arme, les Belges ne peuvent défendre la position.

Gilbert Roumieux est tué, deux autres gars sont faits prisonniers, et un quatrième est gravement blessé. Tous les autres se cachent et s'échappent dans toutes les directions ; emportant avec eux leur ami blessé et saignant. Un mois plus tard, leur chef, Jules Daco, sera capturé et fusillé par les Allemands.

GR 14 entre La Roche-en-Ardenne et Journal GR 14 entre La Roche-en-Ardenne et Journal, croix des Maquisards

Un peu plus loin, nous quittons le tracé « actuel » du GR 14 et suivons, toujours dans la forêt, les balises du « nouveau » tracé (version 2018).

GR 14 entre La Roche-en-Ardenne et Journal

Au terme de ce beau tronçon forestier, nous retrouvons l’asphalte et progressons sur celui-ci, au milieu de la campagne, durant un kilomètre. En chemin, nous passons devant le château de Grainchamps. Isolée au centre d'un grand jardin arboré, cette énorme bâtisse en briques a été érigée vers 1880.

Si les toitures confèrent au château une allure néo-renaissance, son plan général et le calcaire utilisé dans les encadrements et les éléments structurants participent davantage au mode néoclassique. C’est un bon exemple de l'exubérance de l'architecture castrale de la fin du XIXe siècle.

Château de Grainchamps

Par un chemin de terre, nous descendons vers Journal et revenons sur le parcours « originel » du GR 14. Nous traversons tout le village qui était, jadis, une seigneurie foncière relevant de la cour féodale de La Roche-en-Ardenne. Avec l’agriculture, l’exploitation de la forêt y a toujours constitué l’essentiel des activités humaines.

Cependant, une petite industrie métallurgique s’est jadis installée le long du ruisseau de Bronze, mais à la fin du XIXe siècle, elle avait déjà disparu depuis longtemps. Durant ce même siècle, le réseau routier s’est étendu, notamment par la création des routes Marche-en-Famenne - Bastogne et Saint-Hubert - La Roche-en-Ardenne ; leur proximité a profité au village qui s’est ainsi développé.

GR 14 entre La Roche-en-Ardenne et Journal

Après l’église Saint-Joseph, nous découvrons une croix avec, en dessous, cette inscription à méditer « Passant, pense à Dieu. Tu fais peut-être ton dernier voyage ! ». Mise à jour, mars 2022 : le tracé du GR 14 a été modifié ; il ne passe plus par Tenneville. La suite de ce texte n'est donc plus d'actualité.

Journal, église Saint-Joseph

À la sortie de Journal, nous montons, sur l’asphalte, au milieu des champs et atteignons ainsi le point culminant de l’étape à 448 mètres d’altitude. Nous tournons ensuite à gauche et descendons vers la N843 en empruntant un chemin herbeux passant entre des prairies.

Nous sommes ici proches du village de Champlon qui, au Moyen Âge, formait une dépendance de l’abbaye de Saint-Hubert. Le lieu-dit « Barrière de Champlon » (où l’on trouve une auberge de jeunesse) se réfère à l’emplacement d’une barrière d'octroi présente jusqu’à l’occupation hollandaise.

Après avoir suivi, sur 300 mètres, la N843, nous continuons, dans la même direction, sur un chemin caillouteux. 400 mètres plus loin, le tracé blanc et rouge prend sur la droite, une sente herbeuse traversant des prés jusqu’à une exploitation agricole.

GR 14 entre Journal et Tenneville GR 14 entre Journal et Tenneville

C’est sur l’asphalte que nous descendons jusqu’au hameau de Ramont. Nous franchissons le ruisseau de Tenneville et grimpons un escalier permettant d’atteindre le bas-côté de la N4 ; nous marchons le long de cette route durant 300 mètres.

Le balisage nous invite ensuite à emprunter le passage souterrain pour gagner l’autre côté, mais afin de rejoindre l’église de Tenneville, nous continuons au bord de la nationale, sur 300 mètres (hors GR). C’est là que nous retrouvons, vers 15 h 30, la seconde voiture laissée là le matin.

Plan du parcours

➔ Jonction avec d'autres GR

  • Le GR 57 : Sentiers de l'Ourthe remonte, au départ de Liège, le cours de l’Ourthe jusqu’au barrage de Nisramont. Ce sentier de grande randonnée se divise ensuite en deux branches : une qui suit l’Ourthe occidentale jusqu’à Libramont ; une autre qui remonte le cours de l’Ourthe orientale vers Houffalize et Troisvierges (Grand-Duché de Luxembourg).

  • Le GRP 151 : Tour du Luxembourg belge. Au départ de Neufchâteau, ce sentier de grande randonnée effectue une grande boucle de 236 km à travers la province de Luxembourg. Il passe notamment par Libramont, Mirwart, Marche-en-Famenne, Tenneville, Martelange, Habay-la-Neuve et Suxy.