Les Randos de Fred & Paul

GR 576 : Bernardfagne → Hamoir (20 km) - août 2013

Vers 9h20, nous débutons cette étape qui va nous mener jusqu’à Hamoir où nous avons notre hébergement pour la semaine. Après avoir longé l’enceinte du collège Saint-Roch, nous tournons à gauche dans le bois de Bernardfagne. Nous montons d’une quarantaine de mètres par un sentier dans la futaie puis poursuivons, sur des sentiers plus larges, entre des haies.

GR 575-576 entre Bernardfagne et La Rouge Minière

Nous atteignons La Rouge Minière et effectuons un petit détour pour découvrir la chapelle du village dédié à la Vierge des Pauvres. Les habitants de La Rouge Minière n'avaient jadis à leur disposition que la chapelle castrale de Grimonster comme édifice de culte, ou bien la chapelle du Petit séminaire de Saint-Roch. Cette situation exigeait des déplacements longs et souvent pénibles et l'on comprend que, depuis longtemps, une chapelle était vivement désirée dans le village. Le 6 août 1944, devant une foule nombreuse et enthousiaste, son Excellence Mgr. Kerkhofs vint inaugurer et bénir la chapelle. La façade de cet édifice, pouvant contenir une centaine de personnes, est protégée par un auvent soutenu par quatre colonnes en chêne. Au-dessus de ce dernier, une niche abrite une grande statue de Notre-Dame de Banneux.

GR 575-576 : La Rouge Minière, chapelle ND des pauvres

Mise à jour, janvier 2019 : le GR 576 est rejoint ici par le GRP 571 : Tour des Vallées des Légendes avec qu'il fera parcours commun pendant 900 mètres. Nous traversons le village et passons devant une belle fontaine qui, comme l'indique une inscription, est due à la munificence de Jean-Nicolas Fischbach de Malaccord, châtelain de Grimonster. En 1832, il écrit à l’administration de Ferrières pour venir en aide aux habitants du village mal équipé en eau.

« Depuis mon séjour à Grimonster, j'ai vu avec peine, que les habitants de la Rouge Minière n'ont point d'eau vive à leur disposition actuelle, pour les besoins du ménage et pour l'usage de leur bétail, que celle qu'ils doivent aller puiser au ruisseau de Pouhon qui coule au pied de la montagne sur laquelle le hameau est situé. Les peines qu'endurent ces habitants, en devant plusieurs fois par jour descendre cette montagne et la remonter autant de fois avec des fardeaux dans des temps rigoureux de l'hiver, ont excité, dans mon cœur, un sentiment de compassion qui m'a fait prendre la résolution de leur procurer l'avantage d'avoir l'eau au milieu de l'endroit, si l'autorité communale veut me permettre de faire exécuter à mes frais les travaux que nécessite cette utilité publique.

Je placerai sur le terrain vague qui se trouve au milieu de l'endroit un soc de pierre dans lequel je conduirai l'eau de la fontaine au moyen de tuyau de plomb que je ferai placer dans le sein de la terre. Je ferai creuser un bassin pour recevoir les eaux qui découleront de ce bac et de ceci résulteront plusieurs avantages pour les habitants qui auront tout près de leur demeure : une autre source pour leur consommation du ménage, un bel abreuvoir pour leurs bestiaux et un réservoir d'eau en cas d'incendie. »

Le vase en fonte qui domine la fontaine a été moulé et fondu au fourneau de Ferot. Les deux marronniers entourant la fontaine sont classés arbres remarquables.

GR 575-576 : La Rouge Minière, fontaine

Par un sentier, nous quittons La Rouge Minière ; nous poursuivons sur un large chemin, parallèle au ruisseau de Pouhon, vers Grimonster. La signification du mot « ster » est toujours controversée. Le mot pourrait être d'origine germanique et signifierait un lieu, un endroit, une assise, un établissement. Le plus souvent, il désigne des sommets boisés, des plateaux élevés. Nulle part, l'emplacement n'apparaît très enviable. Les « ster » ont été fondés en terres ingrates, donc, après la plupart des localités connues et leurs existences seraient liées aux défrichements tardifs qui commencent au XIe siècle. Ce doit être le cas pour Grimonster, situé en plein bois, qui pourrait être un établissement forestier ou une simple ferme implantée après défrichement.

GR 575-576 entre La Rouge Minière et Vieuxville

Nous montons par le chemin de Piltus d’abord à travers bois, puis entre des près. À l’orée d’un autre bois, nous descendons vers la N66 que nous longeons brièvement. Ici, sur la commune de Ferrières, les sentiers et petits chemins sont renseignés en wallon. On trouve ainsi des « Pazê » et des « Voye ». « Pazê », qui vient de l’ancien liégeois « passeal », a autrefois souvent été employé dans le sens de sentier ; « voye » signifiant chemin ou voie.

GR 575-576 entre La Rouge Minière et Vieuxville GR 575-576 entre La Rouge Minière et Vieuxville

Par de beaux sentiers, le plus souvent entre des haies, au milieu des prairies, nous nous dirigeons vers le hameau de Malaccord. Le tracé blanc et rouge emprunte la N66 sur 300 mètres avant de tourner, à gauche, sur un chemin étroit, vers le moulin de Ferrières. Si l’on ignore de quand date cet ancien moulin à eau, on sait cependant qu’un record de la seigneurie de My, daté du 22 octobre 1425, cite le moulin comme point de repère dans les limites de ladite seigneurie. On peut d’ailleurs voir une ancienne borne principautaire indiquant la limite entre le comté de Logne et celui de Durbuy.

GR 575-576, ancienne borne frontière au moulin de Ferrières

Nous cheminons, entre un bois à droite et un pré à gauche, dans la vallée de la Lembrée qui coule parallèlement à notre itinéraire. Un peu en aval de la ferme de Lembrée (vers laquelle nous nous dirigeons), les eaux de ce ruisseau pénètrent progressivement sous terre poursuivant leur cours par une galerie inférieure au cours initial et ne réapparaissent que trois kilomètres plus loin aux alentours de Vieuxville.

Après cette ferme, le GR 576 franchit la Lembrée et monte pendant 1,5 km sur une petite route asphaltée ; nous faisant passer de 196 à 250 mètres d’altitude. Au sommet, où nous bénéficions d’un beau panorama, notamment sur le village de My, nous prenons un sentier entre un bois et des champs.

GR 575-576 : vue sur le village de My GR 575-576 entre La Rouge Minière et Vieuxville

La descente vers Vieuxville se fait, par un étroit sentier sinueux, à travers la réserve forestière de la Grand Vâ. L’originalité du site tient à son orientation est-ouest : le ravin présente un versant exposé au sud et un autre au nord. Cette situation détermine des conditions écologiques très différentes d’un versant à l’autre. Sur les affleurements rocheux ensoleillés se développent des pelouses sèches alors que sur le versant exposé au nord, on trouve une riche forêt.

C’est près de la chapelle Saint-Roch, munie d’une horloge, que nous trouvons un coin pique-nique aménagé convenant parfaitement pour la pause de midi. Nous sommes ici au niveau de la résurgence de la Lembrée et découvrons un avis de la commune de Vieuxville, datant de 1934, qui est en fait un règlement sur les bains !

GR 575-576 : Vieuxville, chapelle Saint-Roch GR 575-576 : Vieuxville, résurgence de la Lembrée GR 575-576 : Vieuxville, résurgence de la Lembrée

Par un sentier entre deux haies, nous rejoignons la N86. Au bord de cette nationale, on peut admirer les restes de l'église romane de Vieuxville qui comptait, avec les églises des localités voisines de Tohogne et de Xhignesse, parmi les constructions romanes les plus remarquables de la région. Malheureusement, une bonne partie de cette église, datant des environs de l'an 1100, a été démolie en 1893. Seul le chœur, en meilleur état, fut épargné. Il se trouve dans l'enceinte du cimetière de Vieuxville, à une centaine de mètres de la nouvelle église, et remplit désormais la fonction de chapelle du cimetière.

GR 575-576 : Vieuxville, église romane

La partie la plus vallonnée de l’étape débute de l'autre côté de la N86. Nous avons une rude montée, pendant 500 mètres, pour parvenir jusqu’à la clôture d’une propriété privée que nous longeons sur un étroit sentier. Nous franchissons une barrière et entrons dans la réserve naturelle domaniale des coteaux de Vieuxville. Bien vite, nous passons une seconde barrière et descendons en 200 mètres, les 50 mètres d’altitude que nous venions à peine de gravir !

GR 575-576 entre Vieuxville et Sy GR 575-576 entre Vieuxville et Sy, les coteaux de Vieuxville

Passage d’une autre barrière pour parvenir sur une route menant à la ferme de Palogne. C'est ici que nous croisons le GR 57 : Sentiers de l’Ourthe avec qui nous ferons parcours commun jusqu'à Hamoir (six kilomètres). Ce sentier de grande randonnée remonte, au départ de Liège, le cours de l'Ourthe jusqu’au barrage de Nisramont. Il se divise ensuite en deux branches : une qui suit le cours de l’Ourthe occidentale jusqu’à Libramont ; une autre qui remonte le cours de l’Ourthe orientale vers Houffalize et Troisvierges (Grand-Duché de Luxembourg).

Tout près d’ici, on peut découvrir et visiter les ruines du château fort de Logne construit sur un site privilégié de la vallée de l'Ourthe, en amont de son confluent avec la Lembrée. Le dernier kilomètre du cours de la Lembrée est quasiment parallèle à celui de l'Ourthe. Ce mince éperon rocheux, d'une soixantaine de mètres de haut, entre ces deux vallées encaissées, a permis la construction du château fort, bastion haut perché, facile à défendre.

Au Ve siècle, le site participe à la défense du territoire romain face aux incursions des peuples germaniques. Au IXe siècle, les moines de Stavelot y abritent les reliques de saint Remacle lors des invasions normandes. Au XIe siècle, Logne se retrouve au cœur des domaines de l'abbaye dont il devient la principale forteresse. En 1138, l'abbé Wibald fait procéder à la réfection complète de la place qui vit un moment d'apogée. En 1427, le château et les terres qui en dépendent sont cédés à la famille de la Marck. Celle-ci s'impliquant dans les nombreuses guerres qui opposent la France et la Bourgogne ne tarde pas à se faire une réputation peu enviable. À quelques heures de chevauchée de Liège, Logne devient une base idéale pour des coups de force dans toute l'Ardenne et le pays des princes-évêques.

Au début du XVIe siècle, le château acquiert une nouvelle configuration entièrement conçue pour l'artillerie à poudre, alors en pleine évolution. Il est complètement remanié et devient une forteresse « moderne »... pour quelques années seulement. En effet, en mai 1521, au terme d'un siège violent, il est pris et démantelé sur l'ordre de l'empereur Charles Quint. Pillés, oubliés, devenus carrière de pierre, les vestiges sont remis au jour à partir de 1897.

GR 575-576 : château de Logne

Un peu avant la ferme de Palogne, le GR 576 reprend de la hauteur en montant dans le bois par un sentier indiqué comme étant « Voye del he des larons ». Après cette montée abrupte, nous continuons, en pente plus douce, sur un sentier sinuant sur la crête. Par endroits, nous avons de beaux points de vue, notamment sur l’Ourthe qui coule 80 mètres plus bas.

GR 575-576 entre Vieuxville et Sy, la vallée de l'Ourthe

Nous amorçons ensuite la descente sinueuse vers Sy que nous atteignons un peu avant 14h. Le village se situe au bord de l'Ourthe, sur la rive droite, à un endroit où les versants de la vallée sont très abrupts. Les routes venant de Filot et de Vieuxville se rejoignent au-dessus de Sy pour descendre dans le village et y former un cul-de-sac. Des passerelles, le long des deux ponts de chemin de fer, permettent aux seuls piétons et cyclistes de se rendre sur la rive opposée.

GR 575-576 entre Vieuxville et Sy

Nous passons à côté de la charmante église Saint-Laurent, puis nous découvrons une stèle en hommage au peintre Richard Heintz. Parfois comparé à Van Gogh, par rapport à son style de peinture, il trouvait son inspiration en Italie, mais aussi dans les Ardennes. Il a vécu pendant de nombreuses années à Sy, son endroit préféré.

GR 575-576 : Sy, église Saint-Laurent et stèle Richard Heintz

Le tracé blanc et rouge nous emmène au bord de l’Ourthe pendant 700 mètres ; un tronçon à plat, bien agréable, sur un sentier le long d’une prairie. Nous passons au pied d’impressionnantes barrières rocheuses, très appréciées des adeptes de l’escalade.

GR 575-576 entre Sy et Hamoir GR 575-576 entre Sy et Hamoir, rocher de la Vierge

Nous quittons provisoirement l’Ourthe pour monter, par un sentier à travers bois, jusqu’à une barrière métallique. Une fois cette dernière franchie, nous nous retrouvons dans une prairie que nous traversons en ayant pour point de repère une autre barrière métallique.

GR 575-576 entre Sy et Hamoir

Les deux derniers kilomètres de l'étape s'effectuent, hélas, sur le goudron ne nous offrant pour seule distraction que la contemplation du château de Lassus. La plus ancienne partie de ce château est un donjon avec une petite tour attenante, bâti au début du XIVe siècle. Aujourd'hui couvert d'un toit, ce donjon était autrefois crénelé. Le château a longtemps été la propriété de la famille de Maillen, mayeurs héréditaires de Hamoir ; ceux-ci ont fait ériger une petite chapelle castrale en 1633. Au cours du XVIIIe siècle, le bâtiment est totalement remanié en style Louis XIV.

GR 575-576 : Hamoir, château de Lassus

En dehors de la petite chapelle castrale, une chapelle dédiée à Saint-Pierre se trouve en regard du château ; sa fondation remonte à 1396. Outre son style intérieur de type Renaissance, on remarque des pierres tombales des familles de Donnéa et de Maillen.

GR 575-576 : Hamoir, chapelle Saint-Pierre (Lassus) GR 575-576 : Hamoir, chapelle Saint-Pierre (Lassus)

Il est près de 15h quand nous retrouvons les rives de l’Ourthe et la petite ville d’Hamoir où se termine, sous une légère pluie, cette étape.

Tracé de l'étape