Les Randos de Fred & Paul

Camino : O Cebreiro → Triacastela (22 km) - mai 2025

Il est 9 h lorsque s’ouvrent les portes de l’église Santa María la Real nous permettant de découvrir ce bel édifice, dont l'une des plus anciennes mentions écrites remonte à 1072. Cette église, de style préroman, était probablement liée à un hôpital dirigé par des moines bénédictins.

O Cebreiro, église Santa María la Real

À l'intérieur, on peut admirer des fonts baptismaux du IXe siècle ainsi qu’une sculpture romane de la Vierge (XIIe siècle). Le tombeau d’Elías Valiña se trouve dans la chapelle à gauche du chœur. Né en 1929, il fut ordonné prêtre en 1957 et affecté à la paroisse d’O Cebreiro.

D’ici, il s’est lancé dans une mission personnelle : redonner vie à l’ancien pèlerinage jacquaire, alors en déclin manifeste. Son œuvre fut discrète mais constante, alliant la restauration du village d’O Cebreiro à l’amélioration des infrastructures et au développement d’un réseau d’accueil pour les pèlerins.

Son héritage le plus reconnaissable est certainement l’utilisation de la flèche jaune comme symbole d’orientation pour les pèlerins. Lui-même, pinceau à la main et aidé de bénévoles, en peignit des centaines. Même s’il n’en fut peut-être pas l’inventeur, il est celui qui l’a popularisée et érigée en icône du Chemin.

Elías Valiña est décédé à O Cebreiro le 11 décembre 1989. À l'extérieur de l’église, une statue lui rend hommage et à Sarria, près de son hameau de naissance, nous découvrirons demain, une belle fresque en sa mémoire.

O Cebreiro, Elías Valiña

Dans la chapelle à droite du chœur, se trouvent le calice, la patène et les reliques (don des Rois Catholiques) du célèbre miracle eucharistique. Un matin d’hiver, au XIVe siècle, seul un habitant de la paroisse voisine brava le mauvais temps et se rendit, ici, à l'église pour assister à la messe.

Le moine, incrédule, méprisa le sacrifice du paroissien et s'écria à son arrivée : « Faut-il être bête pour faire tout ce chemin, par une telle tempête, pour un peu de pain et de vin ! ». À ce moment-là, le pain que le prêtre tenait dans ses mains fut transformé en chair du Christ et le vin en son sang.

O Cebreiro, reliques

Après cette visite, nous traversons le village qui abrite quelques pallozas. Ces bâtiments, très caractéristiques des montagnes du nord-ouest de la péninsule ibérique et adaptés à l'environnement et au climat de la région, servaient encore d'habitation dans de nombreux villages montagnards jusqu'à la seconde moitié du XXe siècle.

D'origine celtique, les pallozas sont généralement de forme circulaire ou ovale ; leur diamètre varie entre dix et vingt mètres. Elles sont dotées de murs bas en pierre et couvertes d'un toit conique en chaume, fait de paille et de tiges de seigle. Le même bâtiment étant utilisé à la fois par les familles (jusqu'à 9 ou 10 personnes chacune) et leur bétail.

O Cebreiro, palloza

Nous nous éloignons du village en empruntant le Camino Complementario ; légèrement plus long (100 m) que l’itinéraire « officiel », il propose un parcours plus agréable, car moins proche de la LU-633.

Ce tronçon grimpe d’abord, à travers bois, vers le mont Pozo de Area (1 376 m d’altitude, point culminant de l’étape). Il descend ensuite, sur l’asphalte, en direction de Liñares. En chemin, nous profitons de quelques beaux points de vue sur les chaînes de montagnes d'O Courel (à gauche) et d'Os Ancares (à droite).

Camino Francés entre O Cebreiro et Liñares Camino Francés entre O Cebreiro et Liñares

Après avoir croisé un troupeau de vaches, nous passons devant l'église San Esteban. Datant du VIIIe siècle et de conception similaire à celle de Santa María d’O Cebreiro, elle est dotée d'une seule nef rectangulaire et d'une tour carrée. Jadis, dans ce hameau, les moines d’O Cebreiro cultivaient le lin pour leurs besoins et ceux de l’hôpital.

Liñares, église San Esteban

Nous quittons Liñares (1 221 m d’altitude) et prenons, de l’autre côté de la LU-633, un chemin forestier, parallèle à la route, montant jusqu’à l’Alto de San Roque (1 270 m d’altitude).

Camino Francés entre Liñares et l’Alto de San Roque

Sur ce col, une statue en bronze (d’environ 4 m de haut) représente un pèlerin luttant contre le vent. Sculptée par José María Acuña, en 1993, l’œuvre rend hommage à tous les randonneurs qui ont gravi ces cols. Le personnage, en plein effort, s'appuie sur son bâton et tient son chapeau avec sa main gauche.

Alto de San Roque

Le Camino Francés revient sur le chemin emprunté précédemment et continue sur celui-ci, toujours à proximité de la LU-633, durant 1,2 km, jusqu’à Hospital da Condesa (1 240 m d’altitude).

Camino Francés entre l’Alto de San Roque et Hospital da Condesa

Ici, se trouvait autrefois le plus célèbre hôpital pour pèlerins de la région ; il servait d'abri aux voyageurs blessés et fatigués qui entraient en Galice. Cet hôpital aurait été fondé, au IXe siècle, par la comtesse Doña Egilo.

Le village s'est développé autour de cet hôpital et de son église, liée à l'Ordre de Malte. L'édifice religieux, dédié à San Xoán (San Juan en espagnol), daterait du XIIe siècle. Comme tant d'autres dans la région, il présente un style roman simple, avec des murs en granit et une tour accessible par un escalier extérieur.

Hospital da Condesa, église San Xoán

À la sortie d’Hospital da Condesa, nous évoluons au bord de la LU-633 ; même s’il y a peu de trafic, une glissière de sécurité nous protège des voitures. Après un kilomètre, nous prenons, sur la droite, la route menant à Sabugos ; nous l’abandonnons rapidement au profit d’un agréable chemin de terre.

Camino Francés entre Hospital da Condesa et Padornelo Camino Francés entre Hospital da Condesa et Padornelo

Dans le hameau de Padornelo, nous découvrons l’église San Xoán, construite tout en granit. Au XIIe siècle, l’évêque de Santiago plaça l’église sous la protection des Hospitaliers de l’Ordre de Saint Jean de Jérusalem, qui établirent ici un prieuré, avec pour mission de soigner et de défendre les pèlerins… il n’en reste rien.

Padornelo, église San Xoán

Au-delà de Padornelo, nous empruntons une petite route qui nous ramène à la LU-633. Ce tronçon, de 400 mètres, nous fait passer de 1 277 m à 1 337 m d’altitude. Au sommet, au col de l’Alto do Poio, une petite pause est la bienvenue.

Réhydratés, nous abordons la descente vers Fonfría, situé à 3,5 km. Rapidement, un choix se présente à nous, soit continuer tout droit sur un chemin proche de la LU-633, soit opter pour le Camino Complementario (150 m plus long, mais éloigné de la route).

Camino Francés entre Padornelo et Fonfría

Nous choisissons, bien entendu, la « variante » et profitons pleinement de ce parcours d’abord dans les sous-bois, puis entre les prairies.

Camino Francés entre Padornelo et Fonfría Camino Francés entre Padornelo et Fonfría

Le village doit son nom à une source froide (fons fría), qui existe toujours devant l’église San Xoán. Construite au XVIe siècle sur les vestiges d'un temple roman tardif, celle-ci se distingue par sa solide architecture ; l’édifice a été restauré en 1964, seules les pierres de la porte sont d’origine.

L’hôpital Santa Catalina exista de 1535 jusqu’au XIXe siècle. La tradition raconte que les pèlerins qui arrivaient ici recevaient du feu, du sel, de l'eau et un lit avec deux couvertures.

Fonfría, église San Xoán

Pendant 1,2 km, nous marchons sur un chemin caillouteux en surplomb de la LU-633. Après avoir frôlé cette route, le Camino Francés s’en écarte à nouveau légèrement pour suivre un chemin forestier, encaissé, descendant en direction d’O Biduedo.

Camino Francés entre Fonfría et O Biduedo

Le village tire son nom du grand nombre de bouleaux (abedule en espagnol) qui prolifère ici. La charmante petite chapelle San Pedro se caractérise par son vaste atrium formé de trois arcades ; sa date de construction n’est pas connue.

O Biduedo, chapelle San Pedro

Si jusqu’ici, le parcours était vallonné, mais sans dénivelé très important, à la sortie d’O Biduedo, cela va changer. En effet, nous entamons maintenant la descente finale vers Triacastela qui nous fera passer, en 7 km, de 1 192 m à 663 m d’altitude !

L’itinéraire s’éloigne de la LU-633 pour descendre sur de larges chemins caillouteux, au milieu des pâtures. Au loin, nous apercevrons une grande carrière de calcaire qui joua un rôle important dans l’histoire du Camino.

Camino Francés entre O Biduedo et Fillobal Camino Francés entre O Biduedo et Fillobal

Il y a des siècles, en guise de pénitence, les pèlerins y collectaient des pierres qu’ils transportaient jusqu'à Castañeda, un village, situé entre Arzúa et Melide, abritant des fours à chaux. Là, les pierres étaient cuites et transformées en mortier utilisé pour bâtir la cathédrale de Saint-Jacques et d'autres monuments jacobins.

Camino Francés entre O Biduedo et Fillobal

À la sortie de Fillobal (961 m d’altitude), où un homme préhistorique nous menace (décoration du bar de ce hameau), nous traversons une route et continuons la descente. Toujours sur de beaux chemins caillouteux se faufilant entre les prairies et les sous-bois, nous revenons, une dernière fois à la LU-633.

Camino Francés entre Fillobal et Pasantes

De l’autre côté de la route, après avoir découvert la chapelle dos Remedios dans le hameau de Pasantes, le parcours continue vers Ramil en évoluant dans un « corredoira » : un chemin, limité par des pierres de granit, sous les hêtres et les châtaigniers.

Camino Francés entre Pasantes et Triacastela

Dans ce hameau, situé à un kilomètre de l’arrivée, nous nous arrêtons un instant devant un impressionnant châtaignier de plus de 800 ans, avec son tronc de 8 mètres de circonférence. Par la bien nommée, rue Peregrino, nous atteignons, vers 15 h 30, Triacastela où se termine cette étape.

Ramil, châtaignier

Si les historiens débattent pour savoir si ce nom est dû à trois châteaux ou à trois forts, dont des vestiges archéologiques sont préservés, ils semblent s'accorder sur le fait que le roi Alphonse IX de León a joué un rôle clé dans le développement de cette cité en lui donnant un élan significatif à la fin du XIIe et au début du XIIIe siècle.

Triacastela conserve quelques ruines de ce qui étaient autrefois des bâtiments directement liés aux pèlerinages, comme un ancien hôpital, une prison, une auberge... Cette ville est un lieu de repos depuis l'origine des pèlerinages.

Plan du parcours